Il y a de ses artistes, volontairement ou non, qui ne passeront jamais, sinon assez peu à la radio et qui ne visaient pas cette radio de toute manière.
Mais qui composent une musique défiant les conventions de la pop ou du rock, usant assez peu de l'esthétique traditionnelle jusqu'au point de ne pas se limiter nécessairement à l'attendu 1 batteur, un guitariste, un chanteur, une base. Ou si tel est le cas, on travaille nos instruments si différemment que la radio ne trouvera cela jamais assez traditionnel pour passer régulièrement leurs morceaux. On offre/offrait de l'inattendu. Toujours risqué pour un artiste (pensez Radiohead), mais très souvent fort agréable dans les initiatives sonores.
C'est ce que je m'attends toujours d'un(e) artiste. Qu'il/elle m'ouvre l'esprit sur de nouvelles vagues à surfer. Qu'ils ne suivent pas les tendances, qu'il les créés.
En voici 6, couvrant 6 décennies de musique, qui, avec le temps, m'ont beaucoup passionné par leur audace créative. Ils ont tous quelques morceaux sur mes listes de lecture.
Nick Drake
Nick était un auteur-compositeur guitariste et chanteur, signant trois albums entre 1969 et 1972. Étudiant de l'Université de Cambridge, il a signé son premier contrat alors qu'il n'avait que 20 ans. Aucun de ses albums, entre 1969 et 1972 n'a vendu plus de 5000 copies avant sa mort. Son aversion pour donner des spectacles, son hypersensibilité, sa timidité maladive, et son refus d'accorder des entrevues ou même de se faire prendre en photo ou filmer passé 21 ans ont probablement contribué au manque de succès de son matériel. Drake souffrait de dépression et ses textes le révèlent assez clairement. Après l'enregistrement (à huis clos) de son dernier album, il a retraité dans la maison de ses parents en Angleterre et a été retrouvé mort le 25 novembre 1974, d'une surdose d'anti-dépresseurs. Il n'avait que 26 ans. Sa mort a été comprise comme un suicide, mais ce n'est pas certain. Lui qui aimait plus écrire que parler n'a rien écrit avant de mourir. Robert Smith de The Cure, Peter Buck de REM, Kate Bush, Beck, Paul Weller, The Black Crowes, The Dream Academy sont des confirmées influences de ses trois albums. The Dream Academy lui ont écrit et dédié leur meilleur morceau.
Steely Dan
Walter Becker et Dan Fagen étaient collégiens quand ils se sont rencontré et ont choisi de se partir un band. Leur premier band comprenait même Chevy Chase à la batterie. Quand est venu le moment de choisir un nom de groupe, Fagen & Becker ont choisi le nom que donnait William S. Burroughs à un dildo dans son livre The Naked Lunch. Ils ne croyaient jamais que leur band pognerait, ni que Burroughs et son livre seraient majeurs dans l'histoire de la littérature nord américaine. De tous ceux dont je vais vous parler, c'est le band qui aura le plus "d'acceptation radio".Le groupe a eu de multiples incarnations, dont une comprenant Micheal MacDonald aux voix et au piano, mais Fagen & Becker y ont toujours été. Dès 1974, le groupe ne se produit plus sur scène et choisit de lourdement travailler en studio. Travaillant un son plus jazzé, latin rock, reggae, R&B et Blues. Les productions seront toujours sophistiquées avec des musiciens de grandes qualités d'invité comme Wayne Shorter ou des artistes ayant travaillé avec Miles Davis. Le magazine de musique Rolling Stone dira d'eux qu'ils sont les parfaits antihéros du rock et de la pop. Becker est décédé en 2017. Je triche avec eux quand je dis qu'ils étaient trop cool pour la radio, la radio leur a été si bonne qu'on les introduit au Temple de la renommée du Rock'n roll en 2001. Mais on faisait jouer des morceaux précis. Pas les plus pointus.
My Bloody Valentine
Ils sont irlandais, et je découvrais mes racines irlandaises au début des années 80. Ils avaient déjà quelque chose d'attirant pour moi. Et les lèvres et les yeux de Bilinda Butcher....mamamia!! j'étais en amour. Leur musique est reconnue pour la fusion de guitare dissonante, des textures si lourdes (comme les paupières de Bilinda) parfois qu'on étouffe les voix. Ils ont été accessoires dans la popularité du style shoegazing. Je vous ai déjà parlé de mon amour fou pour un de leurs albums, dont les voix ont principalement été enregistrées à l'aube et la musique, la nuit. Des vampires, comme moi. 2 gars,2 filles, la parité y était. Debbie Googe (la bassiste) et Colm O'Ciosoig (le batteur) la section rthymique quoi, quitte le groupe en 1995. 4 ans après la parution de leur magnus opus. Butcher fait de même deux après. Kevin Shields, principal auteur, mais aussi compulsivement destructeur, deviendra de son propre aveu, fou. 10 ans plus tard, ils se réunissent pour faire une tournée mondiale et lancent un nouvel album en 2013. Ils n'en ont que trois eux aussi. 1988, 1991 et 2013. Et je suis toujours amoureux de Bilinda.
The Beta Band
En demandant à mon Ok Google de me jouer Loving the Alien sur Spotify, l'algorythme qui a suivi m'a fait jouer du Beta Band. Dont j'avais entendu le nom et dont je croyais même avoir un album chez moi. Mais non, je ne les connaissais pas du tout. Et depuis une semaine, je les écoute beaucoup. Folktronica, rock écossais (ils le sont), électronique rock trip hop, jam expérimentaux, des groupes comme Radiohead et Oasis ont dit être de grands fans de leurs explorations. Steve Mason et Gordon Anderson sont les co-fondateurs du groupe qui enregistrera trois albums studio seulement aussi. Entre 1998 et 2004. Mais tous très écoutables. En 2000, le groupe a un léger (re?) gain de popularité quand un de leurs morceaux est utilisé dans une scène du film High Fidelity de Stephen Frears, adapté du livre de Nick Hornby. C'est justement l'album que j'ai le plus écouté la semaine dernière. Radiohead les aimeront tant qu'ils les choisiront pour ouvrir leur tournée de 2002.
The Futureheads
Ross Millard, Barry Hyde, David "Jaff" Craig et Dave Hyde forment le groupe post punk à Sunderland, en Angleterre, au début des années 2000, alors qu'ils étaient tous collégiens. Le nom de leur band vient du nom d'un album des Flaming Lips, qui auraient aussi eu leur place quelque part ici. Leurs influences sont new wave, croisement post punk entre Gang of Four, Devo, XTC, Wire et Fugazi. J'avais demandé leur premier album à Noël, en 2004 et l'ai eu . C'est un album que j'écoute encore avec beaucoup d'amour. Les jeux de voix sont très intéressants. Leur reprise d'un morceau de Kate Bush est assez originalement travaillé. La formation a 6 albums entre 2004 et 2019.
Alt-J
Joe Newman est à la guitare et principalement aux voix. Thom Sonny Green est à la batterie. Gus Unger-Hamilton est aux claviers à la voix. Ils sont tous trois de Leeds, en Angleterre. Gwilym Sainsbury a été un bout de temps avec le groupe, quittant en 2014. Il jouait de la guitare et de la base. En spectacle maintenant, le band utilise des séquenceurs pour jouer sa partie. Le groupe n'a aussi que trois albums, enregistrés entre 2012 et 2017. Mon fils m'a initié à eux. J'adore la formation aux construction musicales atypiques, aux textes post-modernes, aux paroles croisant faits historiques et culture populaire. Dans Matilda, on y référencie The Professionnal de Luc Besson. Dans Fitzpleasure, on y raconte à nouveau la nouvelle de Hubert Selby Jr, Tralala, auteur du New York sale, Last Exit to Brooklyn, livre qui lui, fût adapté en film en 1989. Taro raconte la vie tragique de la photographe de la Guerre Civile Espagnole Gerda Taro, ainsi que de sa relation avec l'aussi important photographe Robert Capa. On y parle même un peu français ("le photographe est mort" à 1:48). J'adore leur audace et l'impossibilité que ça puisse jouer à la radio. Un de leur morceau a tout de même trouvé son chemin dans un jeu vidéo fort populaire. Je crois que c'est là que mon fils a eu le contact premier avec Alt-J.
Tiens, je viens de créer mon propre algorithme musical!
Qu'attends Stingray pour m'engager?
Pour la station "too cool for radio", bien entendu...