L'oeil d'Artemisia, d'Emmanuelle Favier (collection XVIIe de la Maison Malo Quirvane)

Peintres au XVIIe siècle, Artemisia est la fille d’Orazio Genteleschi. Elle a appris auprès de lui et a travaillé sur certaines des toiles signées du prénom de son père. En particulier à Londres où il était à la cour du roi Charles 1er et où elle est aussi venue. De cette époque date une toile, Le repos de la Sainte Famille pendant la fuite en Égypte. Emmanuelle Favier imagine l’apport d’Artemisia à ce tableau : l’oeil du nourrisson qui s’ouvre et regarde le spectateur. Marie a les traits de sa mère, Joseph dort, seul l’enfant regarde. Et pointant son regard vers celles et ceux qui, elle le sait, s’arrêteront devant le tableau, elle s’affirme pour les siècles à venir. Ce qu’elle affirme ainsi, c’est non seulement ses qualités de peintre, mais c’est aussi la force avec laquelle elle a combattu toute sa vie, depuis le viol qu’elle a subi par celui à qui son père l’avait confiée pour lui enseigner la peinture (et qu’elle a représenté en Holopherne décapité par Judith), en passant par le testament de son père léguant ses biens à ses fils (et rien pour elle), et l’énergie avec laquelle elle a gagné sa place dans le monde des arts jusqu‘à Naples. 

Emmanuelle Favier nous fait entrer dans cette histoire avec les mots dont elle a le goût, glissant ici un adjectif de sa composition, comme la peintre ouvre l’oeil de l’enfant, adjectif nous faisant aller dans un brouillard mouillant les herbes dont elle nous rappelle qu’Artemisia est le nom de l’une d’entre elles.