Je ne connaissais rien de Roxane Gay quand j’ai ouvert ce livre, excepté qu’elle est née aux États Unis d’Amérique de parents d’origine haïtienne. Ces quelques nouvelles, dont certaines sont très courtes explorent cette identité particulière dans laquelle on naît ici quand ailleurs, disent les parents, c’est « chez moi ». S’installe alors une identité morcelée. « Nous sommes les gardiens des secrets. Nous sommes des secrets nous-mêmes. Nous essayons de nous protéger les uns les autres de la géographie de tant de chagrin ». Une grand-mère restée en Haïti, une mère venue aux États-Unis et la fille qui va régulièrement voir sa grand-mère tandis que la mère (qui ne voulait pas se marier avec un Haïtien) ne veut pas retourner dans le pays où elle est née, le souvenir de sa naissance et du récit de sa conception provoquant en elle des troubles qu’elle ne peut surmonter : « la douleur habite le pays natal de ma mère ». Mais, quand le père de la fille emmène sa famille en Israël, elle découvre « qu’Haïti n’était pas le seul endroit du monde habité par la douleur ». Roxane Gay écrit simplement, des phrases courtes, manie habilement l’humour, qu’il s’agisse du vaudou ou de la présence américaine dans cette « moitié d’île ». Elle parle d’amour, des hommes, des femmes, de la violence, des larmes, et de l’exil et de l’espoir. Et de Toussaint Louverture.