Le Kantô est la région de Tôkyô et des départements environs. Au nord et au nord-est on trouve les départements de Saitama et de Ibaraki. Le premier est connu pour les thés dits de Sayama, produits essentiellement dans les villes de Iruma, avec le réputé plateau Kanekodai, de Sayama et de Tokorozawa. Le second pour les thé dits de Sashima au sud-ouest du département, mais aussi, au nord, les thés de Okukuji.
Vous pourrez trouver plus de détails sur Sayama et ses origines ici.
Le thé de Sashima correspond quant à lui aux thés produits dans les localités de Koga, Bandô, Jôsô, Sakai et Yachiyo. Ce serait en 1627 que la production de thé fut autorisée par le seigneur du fief de Sekiyado (actuelle ville de Noda), mais c'est après l'introduction en 1834 par Nakayama Motonari de la méthode dite de Uji de fabrication du thé vert que la qualité augmenta et que la région pris son essor.
Depuis l'ouverture de la boutique de Tokyo il y a deux ans, j'ai eu envie de mettre plus avant ces deux régions, Sayama, pas assez connu, et Sashima, pour ainsi dire complètement ignorée du grand public. Ce sont des aires de production de thé dynamiques, avec beaucoup de jeunes producteurs allant de l'avant, essayant d'innover, avec aussi dans la cas de Saitama un centre de recherche à Iruma à l'origine de nombreux cépages très intéressants. Il me semble dommage, qu'avec une telle proximité, ces thés restent finalement pour le moins discret à Tôkyô et même dans leur lieu d'origine.
Venant de faire quelques ajouts de nouveauté en provenance de ce que j'appelle de manière purement personnelle et unilatérale le "Nord-kantô" voilà une occasion de regarder un peu en détails ces thés.
Et je vais donc commencer par deux sencha de Sashima, par un très jeune producteur du nom de Ishiyama, avec qui je travaille pour la première fois année, attiré par sa variété étonnante de cultivars, et convaincu par leur qualité.
En fait, c'est tout d'abord une information qui ne pouvait me laisser indifférent qui fut la raison de cette nouvelle rencontre : un Yamakai de Sashima. Les habitués de ce blog et de Thés du Japon connaissent ma passion pour ce cépage. Je n'en attendais pas trop, et bien ce sencha a largement dépasser mes espérances.


L'autre sencha de ce producteur que je propose est son Asatsuyu. Voilà un cépage qui lui aussi a des arômes bien particuliers, et qui possède son lot de fans. Issu d'une sélection à partir d'un théiers indigène de Uji, et enregistré en 1953 sur la première liste de cultivars à thé, Asatsuyu est un vétéran, qui s'est relativement bien répandu, restant aujourd'hui essentiellement présent à Kagoshima (bien loin de Sashima donc). Attention néanmoins, je constate souvent que beaucoup font une confusion entre les caractéristique des thés de Kagoshima - que sont un umami fort dû à l'ombrage important et à un bon boost d'engrais, et souvent un sucré particulier dû à une torréfaction finale forte (c'est par ailleurs la caractéristique globale des thés verts étuvés de Kyûshû, qui les rends très populaires mais aussi si peu variés) - et les caractéristiques du cultivar Asatsuyu que sont des arômes très verts évoquant fèves ou haricots types edamame (fèves de soja vertes) et soramame (vicia faba), ainsi qu'une couleur très verte, même non-ombrée.


Les deux autres sencha de Sashima sont d'un autre producteur, M. Yoshida (dont les thés noirs sont très réputés) et sont dans un style plus secs. Bien qu'ils soient l'un et l'autre excellents, je passerai plus vite.
Le premier est un sencha à l'étuvage très modéré, aux feuilles peu brisées. Il s'agit du cépage de Saitama, Hokumei. S'il le millésime 2019 péchait un peu par son manque de parfum, cette année on retrouve bien les arômes caractéristiques de ce cépage, évoquant des herbes aromatiques un peu sucrées et épicées. Le tout pour une liqueur un peu tannique, stimulante, mais qui laisse en bouche d'agréable saveurs sucrées. On me demande parfois des conseils pour des thés selon le moment de la journée, infusé bien chaud, voilà un thé du matin.
Enfin, plus élégant et subtil, un sencha à l'étuvage standard, réalisé à partir de feuilles de théiers issus de graines de Yabukita. Bref, chaque théier est différent comme avec du zairai, mais le fait qu'ils aient tous un parent commun (Yabukita), leur donne une certaine unité. (je rappelle que le théier est une plante dont la reproduction est dite auto-incompatible, en somme le pollen ne pourra féconder la fleur d'un même arbre, ou d'un arbre génétiquement identique. Ainsi un croisement entre deux mêmes cultivars, Yabukita x Yabukita par exemple, est impossible).


Ces quatre thés à eux seuls représentes déjà, non loin de Tôkyô, une diversité et une richesse importantes. Dans la deuxième partie, j'évoquerai mes Sayama 2020.