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"État des Lieux" de Richard Ford

Publié le 12 novembre 2020 par Artemisia72

"État des Lieux" de Richard Ford

Richard Ford à la foire du livre de Göteborg, 2013
Domaine public via wikicommons

État des Lieux est le troisième roman que l'écrivain américain Richard Ford, né en 1944 dans le Mississipi, consacre à son personnage récurrent, Franck Bascombe.

C'est un roman foisonnant publié en 2006 aux États-Unis, traduit deux ans plus tard en France, un de ces gros volumes (730 pages) où l'on plonge avec délectation, un livre-monde où l'on s'immerge, et d'où l'on sort avec peine, tant les personnages sont devenus familiers...

Franck Bascombe, ancien journaliste sportif et agent immobilier dans une petite ville du New Jersey, soigne un cancer de la prostate, tout en poursuivant ses activités. Nous allons le suivre durant deux longues journées avant Thanksgiving, et durant le jour même de la fête. L'on entre dans son monologue intérieur, on découvre ce qui fait son univers désormais, un univers peuplé de gens plus ou moins déjantés, plus ou moins désespérés : son ex-femme, Ann, qui lui propose sans y croire un remariage ; son employé, Mike, un Tibétain, qui voudrait bien racheter son agence, et deviendra son associé ; ses deux enfants, Clarissa, qui ne sait trop si elle est lesbienne ou non, et fait une expérience calamiteuse de liaison hétérosexuelle avec un imbécile malfaisant ; et Paul, son fils, à demi demeuré, attendrissant finalement... Et Sally, heureuse avec lui et satisfaite de son mariage, qui prend néanmoins le risque de tout détruire pour retourner auprès de son premier mari, revenu alors qu'on le croyait mort, et dont elle va saccager la pauvre petite vie jusqu'à ce qu'il meure pour de bon...

Durant ces trois journées mouvementées et pourtant grises, Franck revient sur son passé, la mort de son fils aîné à l'âge de neuf ans, qui a brisé son couple, le départ de Sally, et s'interroge sur son avenir...

Mais ce qui est le plus passionnant dans ce très beau roman, c'est l'arrière-plan : l'Amérique de 2000, au moment où Bush "vole" l'élection aux démocrates (mais on a parfois l'impression que c'est une dispute entre deux imbéciles ; qu'eût dit R. Ford de l'élection actuelle !!) ; les déchirures de ce pays, déjà, au point que Bascombe lui-même peut en venir aux mains avec un électeur républicain ; la violence sous-jacente, malgré la grisaille ambiante : le meurtre d'une infirmière en ouverture du roman, une bombe dans un hôpital, au moment où Bascombe s'apprêtait à aller déjeuner à la cafétéria, parce qu'un musulman, déjà, voulait "passer un message"... un "home-jacking" dans la maison du voisin, lorsque deux gamins russes de 14 ans volent leur voiture et en profitent pour tuer le couple, et tirer deux balles dans la poitrine de notre héros, qui survivra...

Cela donne vraiment envie de lire les autres romans de la série :

  • Un Week-end dans le Michigan, où l'on assiste à la mort du petit Ralph Bascombe et à ses conséquences ;
  • Indépendance, où Franck essaie d'établir un lien avec son second fils, Paul, muet ou presque, tout en menant sa vie d'agent immobilier.
  • En toute franchise (2014) : en 2012, Franck est désormais guéri de son cancer, et âgé de 67 ans. Retraité, il vit une vie ralentie, tout en assistant au déclin d'une Amérique plus déchirée que jamais.

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