Quand une voix meurt – et celle de Jude Stefan a la force d’imposer toujours un regard neuf sur les mots – , on se rend compte peut-être que chaque livre, chaque poème, chaque vers concentrent l’énergie qui la fait demeurer, bien qu’elle passe au néant.
arbres blancs arbres de mai vos
roses en beauté vos nos neiges explosent
hâtivement comme ausone et malherbe
qui morts têtes sans force dans leur nuit
foulent le pré des blanches asphodèles
la Vieille Parque parmi les ruines y
trébuchant ramasse leurs derniers mots
les ultimes joyaux avec un râteau pour blason
si nous aimer dressés diffère des couchés,
Euphrasie, beau prénom à prendre à f…
une petite croix endeuille ton nom une
tombe fraîche cueillons vite la nuit
un chien nomme Vieux Soleil y signera
le ciment de sa pisse arabesque en
nitchevoque alias carpe diem
À la Vieille Parque, 1989 (Poésie/Gallimard, p.113)
Avec sa capacité à concentrer le sens et les langues dans ce latin continué qu’est le français, Jude Stéfan, dans ses poèmes, continue de faire face au présent.
Alexis Pelletier 13/11/2020