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Edoardo Sanguineti – Ballade des femmes

Par Stéphane Chabrières @schabrieres

Edoardo Sanguineti – Ballade des femmesquand j’y pense, que le temps est passé,
à ces mères anciennes qui nous ont portés
et puis aux jeunes filles qui furent nos idylles
et puis aux femmes, aux filles et à ces belles filles
si je pense féminin, je pense à la joie :
que je pense masculin, je pense rabat-joie :

quand j’y pense, que le temps est venu,
à cette résistante qui a combattu,
à celle qui fut touchée, à celle qui fut blessée
à celle qui est morte et qu’on a enterrée,
si je pense féminin, je pense à la paix :
que je pense masculin, et penser ne me plaît :

quand j’y pense, que le temps retourne,
que le jour arrive et que le jour ajourne
je pense au giron qu’un ventre de femme enrobe
maison ce ventre qui porte une robe,
ce ventre une caisse qui va finir,
quand arrive le jour, on va tous dormir

parce que la femme n’est pas ciel, elle est terre
une chair bien en terre, qui refuse la guerre :
en cette terre, où je fus semé
j’ai vécu ma vie et j’ai planté,
ici je cherche la chaleur que le cœur ressent,
la longue nuit qui devient un néant

je pense féminin, si je pense à l’humain :
viens ma compagne, je te prends par la main ;

*

Ballata delle donne

quando ci penso, che il tempo è passato,
le vecchie madri che ci hanno portato,
poi le ragazze, che furono amore,
e poi le mogli e le figlie e le nuore,
femmina penso, se penso una gioia:
pensarci il maschio, ci penso la noia:

quando ci penso, che il tempo è venuto,
la partigiana che qui ha combattuto,
quella colpita, ferita una volta,
e quella morta, che abbiamo sepolta,
femmina penso, se penso la pace:
pensarci il maschio, pensare non piace:

quando ci penso, che il tempo ritorna,
che arriva il giorno che il giorno raggiorna,
penso che è culla una pancia di donna,
e casa è pancia che tiene una gonna,
e pancia è cassa, che viene al finire,
che arriva il giorno che si va a dormire:

perchè la donna non è cielo, è terra
carne di terra che non vuole guerra:
è questa terra, che io fui seminato,
vita ho vissuto che dentro ho piantato,
qui cerco il caldo che il cuore ci sente,
la lunga notte che divento niente

femmina penso, se penso l’umano
la mia compagna, ti prendo per mano

***

Edoardo Sanguineti (1930-2010)Ballate (1987, 1989) – Po&sie, numéro 109 (1975-2004)Trente ans de poésie italienne (Belin) – Traduit de l’italien par Martin Rueff.


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