Denise Le Dantec publie Enheduanna, la femme qui mange les mots,
avec 4 dessins de Liliane Giraudon,
aux éditions L’Atelier de l’Agneau.
JE PEUX OFFRIR UN JARDIN
AVRIL en arc-de-triomphe grandiose
plus loin, c’est le bleu l’azur derrière les arbres (
l’herbe pousse sous la haie les bourgeons sont ouverts
(mon crayon aiguisé)
Il fait bon
la gravitation s’éclipse
notre souffle est long le jour aussi (gorgé de pétales)
es animaux sont fabuleux _______Kate Moss est une biche
derrière la colline
son visage doré avec pour fond le merveilleux champ de
phacélies//
)) Nous nous reposons sur des surfaces lumineuses
le forsythia livre ses inconférences
le rouge-gorge aspire la vapeur – les fluides aériens ; tout
comme nous...
nos perles se fracassent dans des ruisseaux de banlieue
(l’épée de l’ange la vache folle le moteur de recherche
le seau en plastique la cuvette cinématographique la
photocopieuse du soir)
... et nous nous bornons à suivre la goutte d’eau dans
ses détours et ses chutes depuis son apparition dans
Kate lit
/ C’est la navigation des mondes C’est mon enfance /
L’ÉCHO GARDE-T-IL UN SECRET
Aujourd'hui, samedi 23 mai 2020
c'est l'été
l'été est l'été de toujours au bord de la rivière
une robe violette / trois mesures de chanson
(un doigt sur la flûte)
J'ai écouté un petit moineau à l'arrêt de bus 23...
c'était bien (
sous les néons d'un girlie bar coulait un fleuve
de tourterelles ((
... Je marchais ainsi le long des plates-bandes rouges
au-dessus flottaient trente-six chandelles fluo
Est-ce un taxi qui attendait la jeune femme au bord des
herbes folles, ou la jeune femme qui
ça ne fait rien
(un énorme cheval dormait sous la palissade, qui portait
un étrange capuchon blanc...
les fourmis dormaient, genoux pliés...
______dans une odeur de diésel brûlé
J’ai encore marché
Denise Le Dantec, Enheduanna, la femme qui mange les mots, Atelier de l’Agneau, 2021, 32 p., 30€
Sur le site des éditions :
Enheduanna, princesse mésopotamienne et poétesse, est considérée comme le premier auteur connu de l'histoire humaine. Elle a écrit 1 700 ans avant Sappho, 1 100 ans avant Homère, 500 ans avant Abraham. Elle a signé des milliers de vers parmi lesquels des poèmes dédiés à la déesse Ishtar, qui sont un hymne d'amour érotique d'une femme à une autre femme.