Conte Jouin n° 4
Ce poème, écrit à 23-24 ans, appartient au registre du délire. En effet, je m'étais marié à 19 ans !
Funeste sauvetage
Au secours ! Je me noie, je sens que je m’enfonce
Je suis à bout de forces et ne me débats plus
Je vais abandonner, mes bras ne tiennent plus
Mes jambes se font lourdes ; il faut que je renonce
Pourtant sur le rivage il y a ce démon
Pour qui je fais la planche et pour qui je surnage
Et puis mon amour-propre, et l’orgueil, et la rage
Ce démon veut m’aider, mais je dis toujours non
Ce démon, c’est la femme, et l’eau le mariage
Si je tiens en surface, ô l’heureux résultat
Je pourrai à jamais, voué au célibat
Chasser la folle idée de me mettre en ménage
Mais tiendrai-je le coup ? je sens l’eau s’épaissir
Des algues d’oranger me tirent par les pieds
Je me sens délirer : le maire et le curé
Dans leurs plus beaux atours me font de grands sourires
Et puis te revoilà et tu me tends la main
Tu tiens une bouée, une bouée bizarre
Qui a forme d’anneau ; je la contemple, hagard
C’est une énorme alliance, un objet inhumain
Non, non, je ne veux pas, ôte de mon regard
Ce symbole doré, signe de l’esclavage
Da l’avilissement et de la mise en cage
De l’homme libre et fier qui succombe et s’égare
Mais tu m’as envoûté, femelle diabolique
Et comme un automate aimanté par l’amante
La mante religieuse aux noces appétissantes
Je te la tends ma main en un geste tragique
A quoi sert de se battre et de lutter en vain
J’aurais dû moins souvent réagir à tes charmes
Au lieu de ça, tu vois, je plie et rends les armes
Je suis pour toi mon loup chèvre du vieux Seguin
J’incarne maintenant Prométhée enchaîné
Au poteau du mariage et tu es le corbeau
Au ramage si doux, au plumage si beau
Que j’aime comme un fou car tu m’as aliéné