Le quai de Ouistreham
Auteur : Florence Aubenas
Éditions : de l’Olivier (4 février 2010)
ISBN :9782879296777
276 pages
Quatrième de couverture
" La crise. On ne parlait que de ça, mais sans savoir réellement qu'en dire, ni comment en prendre la mesure. Tout donnait l'impression d'un monde en train de s'écrouler. Et pourtant, autour de nous, les choses semblaient toujours à leur place. J'ai décidé de partir dans une ville française où je n'ai aucune attache, pour chercher anonymement du travail. J'ai loué une chambre meublée. Je ne suis revenue chez moi que deux fois, en coup de vent : j'avais trop à faire là-bas. J'ai conservé mon identité, mon nom, mes papiers, et je me suis inscrite au chômage avec un baccalauréat pour seul bagage. Je suis devenue blonde. Je n'ai plus quitté mes lunettes. Je n'ai touché aucune allocation. Il était convenu que je m'arrêterais le jour où ma recherche aboutirait, c'est-à-dire celui où je décrocherais un CDI. Ce livre raconte ma quête, qui a duré presque six mois, de février à juillet 2009. J'ai gardé ma chambre meublée. J'y suis retournée cet hiver écrire ce livre. ", Florence Aubenas.
Mon avis
Ayant lu «Tête de turc » et «Dans la peau d’un chinois », il était intéressant pour moi de découvrir ce livre.
Non pas pour comparer car les situations sont malgré tout différentes, mais pour avoir une fois encore, un regard de « l’intérieur » sur des faits que nous ne pouvons ignorer …
Florence Aubenas a donc glissé ses pieds, ses mains, ses bras et tout son corps dans la peau des techniciennes de surface, femmes de ménage ou autres appellations ….
Elle a pris sur elle pour vivre leur quotidien, avec les difficultés qui y sont liées : logement, alimentation, transport mais aussi les bons côtés: la solidarité, l’écoute, le partage …
Elle a rencontré les employés de Pôle Emploi pour qui elle était « le fond de la casserole », les files d’attente interminables, les personnes qui vous écoutent à peine.
Elle a connu les matins où au bout de 2h 30 de nettoyage, elle avait l’impression d’avoir une journée complète dans les jambes. Elle été humiliée, critiquée, de ne pas aller assez vite, de ne pas faire correctement mais elle a également rencontré des êtres humains, certainement plus humains que quelques grands patrons …
Être transparente, avoir l’impression de n’être que le prolongement d’un aspirateur (une des scènes est édifiante, elle est là avec son appareil mais on ne la voit pas, on ne l’entend pas, elle fait partie du décor) …. Tout cela, elle l’a découvert, ressenti au plus profond d’elle-même et elle a su le transmettre d’une écriture simple et régulière à travers une galerie de portraits et de situations diverses.
Je crois qu’au-delà de la souffrance physique, des horaires malaisés, des dos et des nuques raides, ce qui est le plus ardu à vivre, c’est la peur du lendemain.
Ne pas pouvoir refuser deux heures de labeur, à l’autre bout du département parce que « si tu dis non une fois, on t’oublie et c’est fini. », ne pas être sûre d’être reprise pour une autre mission parce qu’on ne va pas assez vite, parce que ça ne brille pas assez ….
Et là, Florence Aubenas sans pathos, sans misérabilisme a su parfaitement être la porte parole de ces femmes.
Il y aura forcément des esprits chagrins qui feront remarquer qu’après, elle a retrouvé sa vie de femme aisée, n’ayant pas de problème d’argent …. D’autres qui diront « Qu’est ce que ce que ça a changé d’avoir écrit ce livre ? »
Je répondrai simplement :
Peut-être rien pour les uns …
Peut-être tout pour d’autres ….