Inexprimable est la simplicité naturelle de l'esprit,
Libre et vaste : par soi-même elle doit être reconnue.
Quand toute fabrication mentale, toute saisie
Et tout attachement s'effacent naturellement,
C'est ce que l'on appelle "reconnaître l'essence de de l'esprit".
Un fois libéré du filet des pensées,
Ne pas perdre la continuité de la présence à la nature primordiale,
Sans agir ni faire effort, ni rien vouloir,
Voilà ce qu'on appelle "préserver la méditation".
Quand les vagues des multiples pensées
Ne font plus, comme les nuages avec le ciel,
Ni bien ni mal à l'esprit, qui demeure serein,
C'est ce que l'on appelle "libérer l'esprit dans sa propre nature".
Lama Mipham 1846-1912, trad. Ricard
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Se donner directement à la limpidité de l'espace, sans support, sans but, sans rien à tenir, sans distraction. Les nuages, dons du ciel, s'offrent au ciel. Ma fin est mon commencement.
Cependant, que l'on me permette cette remarque :
L'approche ici est purement cognitive. Il n'y a rien d'affectif. Il s'agit de se faire témoin des pensées et autres mouvements. Les émotions, désirs et élans sont réduits à des objets pour la "présence" qui est une sorte d'attention.
Or, je me demande si cette approche n'est pas un peu contradictoire : elle est censée ne pas être "intellectuelle", mais elle est foncièrement intellectuelle, comme toutes les approches centrées sur la notion d'éveil.
D'autre part, il n'y a pas d'effort, mais il faut quand même "préserver", "garder". Il n'est pas question de s'abandonner à une force plus grande que soi, de se laisser faire par cette force. Du coup, l'attention mise en jeu dans cette pratique reste "la mienne". Je sais bien que, selon Mipham, elle est censée basculer à un moment dans une attention qui n'est plus "mon" attention, mais toutefois tout part de nos forces et reste dans ce champs.
Quand je m'efforce ainsi, même en vue de ne plus faire d'effort, je reste dans une certaine logique, celle du "mental", disons. Tout ceci reste "froid". La chaleur du cœur, du corps, n'est pas intégrée : seulement, on la laisse être car "elle ne fait plus ni bien ni mal". Suprême indifférence.
Or le problème est : Le mental peut-il se libérer du mental ?