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Considérations inutiles (VI) - Amnésie

Par Jb
5b311a3104531dd25cd3bf01adcb12e7.jpg L’amnésie semble être un phénomène en plein essor à l’ère de la surinformation.
Prenons TF1. La chaîne nous propose, depuis quelques jours, une nouvelle émission de télé-réalité : Secret Story.
Le concept : de jeunes crétins enfermés dans un loft, filmés 24h/24 et qui seront, tour à tour, éliminés. Cela rappelle à chacun la fameuse Loft Story qui sévissait sur M6 voici quelques années. Loana, Jean-Edouard, des prénoms qui resteront à jamais associés à ce programme mythique.
TF1 ne cherche pas à cacher la parenté : c’est d’ailleurs le sémillant Benjamin Castaldi qui présente Secret Story, lui qui à l’époque présentait le Loft. Difficile de faire plus explicite.
Mais là où ça devient très drôle, c’est qu’il faut se rappeler de la réaction de Patrick Le Lay, PDG de TF1, au moment où M6 avait lancé Loft Story. Indignation, réprobation, car à l’époque lui et Etienne Mougeotte avaient voulu nous faire croire que TF1, quant à elle, prendrait la route de la "quête du sens". C’était bien sûr avant Nice People, La Ferme aux célébrités, le retour de la Roue de la fortune, c’était aussi avant les théories marketing de Le Lay autour du "temps de cerveau humain disponible".
Prenons l’Europe maintenant.
Mai 2005 : le choc. Les Français disent non au référendum sur le traité constitutionnel. L’Europe est en panne, la crise s’installe, oui mais malgré tout cocorico : les Français ont fait entendre leur voix, ils ont débattu, se sont exprimés démocratiquement, ils ont remis les préoccupations sociales au cœur de cette usine à gaz, et même si le plan B promis semble long à venir l’essentiel c’est que le peuple souverain ait été entendu et que sa volonté soit faite.
Juin 2007 : depuis quelques jours, chacun dans notre pays se flatte de la pugnacité sarkozyenne qui rend à la France son rôle de co-moteur de l’Union Européenne, qui accomplit le tour de force de faire adopter un mini-traité relançant le processus.
Le référendum démocratique avait été clair : c’est non. Ce vote l’est tout autant : c’est oui, ça n’est plus non. On arrête la déconne maintenant. Personne ne semble réellement s’en émouvoir.
Je précise que je dis cela d’autant plus tranquillement que j’ai voté oui à ce référendum, et que j’ai toujours trouvé stupides les arguments consistant à dire que le plan B allait nous sauver. Il n’y avait donc pas de plan B, nous le savons maintenant, quant aux avancées du traité de l’époque certaines n’existent même plus dans ce mini-traité. Lequel n’est un mini-traité qu’en surface, car il reprend en réalité les traités anciens en y intégrant des amendements, ce qui rend le tout encore plus complexe. Paradoxe : on perd encore plus en lisibilité, alors que l’un des principaux griefs faits à l’époque était… l’illisibilité !
Mais le problème n’est pas là : le problème semble plutôt être qu’en seulement quelques mois, on revient sur ce qui avait été déclaré ou décidé, l’air de rien, en passant.
L’on compte sur l’absence de recul critique, sur la défaillance de mémoire de ceux qui feraient éventuellement remarquer qu’on nous dit blanc aujourd’hui alors qu’on nous disait noir hier.
Tout cela est assez troublant et pose finalement une question dont la réponse n’incite pas forcément à l’optimisme : nous sommes surinformés, nous sommes théoriquement détenteurs d’un maximum d’éléments pour nous forger une opinion, mais il semble que ce savoir soit profondément éphémère. Laissez passer quelques mois et qu’en reste-t-il ?
Faut-il comparer la société de l’information au fleuve Léthée ?

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