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(Anthologie permanente) Cole Swensen, Poèmes à pied

Par Florence Trocmé


Cole Swensen  poèmes à piedCole Swensen publie Poèmes à pied, traduction Maïtreyi et Nicolas Pesquès, Corti, 2021.
Ce livre semble tisser le thème de la marche et celui du poème. En se plaçant sous l’égide de Borges avec cette étonnante citation en exergue : « Les pas d’une personne depuis sa naissance jusqu’au jour de sa mort tracent un dessin sur le temps qu’on ne peut imaginer. L’intelligence divine voit immédiatement la totalité de ce dessin, comme nous voyons un triangle. Ce dessin pourrait bien avoir une fonction spécifique dans l’économie de l’univers. »
Wordsworth
« Dorothy marche de Kendal à Grasmere et de Grasmere à Keswick, une cinquantaine de km à peine, de Alfoxden à Lynmouth et retour juste pour un paysage, un tableau intérieur, affinant à coups de pinceau une nouvelle façon de respirer. Elle put respirer à nouveau, écrivit tout, sous forme de notes : 30 mars : Marché je ne sais où. 31 mars : Marché. 1er avril: Marché au clair de lune. Marcha jusqu'à l'aveuglement. Marcha par grand vent.
Marcha dedans le temps. 2 avril : Marché sous des arbres ; 4 avril : Marché jusqu'à la mer... Grande agitation dans l'air. Femme accroupie en forme de colombe comme la main prend la forme et la taille d'un oiseau en feuilletant un journal : Marcha au crépuscule. Marcha au-dedans. Ne fus ni entendue ni défendue, bien que je ressentisse les forces d'union tentant de réunir le groupe indéterminé de toutes les choses choisies. Je ferai le tri. » (p. 20)
« [Thoreau] marchait souvent plusieurs heures par jour, devenant peu à peu impossible à distinguer de tout ce qui l’entourait. Si tu marches dans le silence absolu, les autres être ne sont pas obligés de se réorganiser en choses reconnaissables. (...)
« (...) où celui qui arrive sur la route
avec un air si familier diffère si peu de celui qui se trouve soudain
devant vous, singulier, complexe : on se rencontre si rarement
dans la forêt de l’humain, dans la forêt du visage, et ainsi passe-t-on
avec un signe de reconnaissance, ainsi faisant exploser le séparation entre les êtres.
dans une région évanescente bien plus proche de la façon dont nous voyageons
de château en château, pour finir par une course de chevaux à travers champs » (p. 30)
Cole Swensen écrit encore « Thoreau croyait en la grammaire
comme laser à distinction, discrétion, dissension, et, dans le laser
à dissection, voyait ». (p. 31)
« Thoreau affirme que la marche, littéralement, structure la littérature, comme une charpente avec le dessin qui en découle. La ligne est toujours
tranquillement une forêt modifiée. » (p. 35)
Voici encore Dickens
« qui voyait un vrai travail   toute la nuit   dans la marche
dans la retenue   dans le labyrinthe dans   lequel une forme fantôme
courait devant lui. » (p. 41)
Cole Swensen, Poèmes à pied, traduction Maïtreyi et Nicolas Pesquès, Corti, 2021, 17€.


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