"Une histoire de scalp", dit le gros titre
tandis que l'affaire bolivienne est traitée dans la colonne de gauche
La Justice argentine s’est saisie de la plainte du gouvernement et va lui donner une suite judiciaire. L’instruction est ouverte contre ce que les magistrats définissent à ce stade comme un délit commercial.
En quelques jours, les versions des personnalités suspectées dans l’affaire ont déjà bien évolué. L’ancien ambassadeur, devenu ministre du Travail de la province de Jujuy, reconnaît maintenant avoir vu des caisses de munitions mais sans avoir su à quoi tout elles pouvaient bien servir. Étrange manque de curiosité pour un homme politique devenu diplomate alors qu’au-dehors se déroule un coup d’État et que les manifestants sont violemment réprimés dans la rue. Même si elle est faite hors procédure, cette déclaration fragilise tout de même la défense de Patricia Bullrich. Celle-ci après avoir tout nié reconnaissait il y a peu qu’il s’agissait de matériel destiné à défendre la représentation diplomatique en cas de coup dur. Elle fragilise aussi celle de l'ancien ministre des Affaires étrangères, Jorge Faurie, qui a dit que son cabinet n’avait jamais pratiqué ce genre de coup tordu. Si donc l’ambassadeur a vu les caisses, il aurait dû s’informer de leur destination et en rendre compte à son ministre de tutelle.
En général, quand les personnes impliquées commencent à se contredire à ce point, cela laisse une grosse place au doute quant à leur innocence. Et c’est peut-être ce qui gêne les journaux de droite qui ne disent pas un mot sur la question aujourd’hui, même pas pour évoquer un coup tordu de la gauche ou une bataille de boules puantes, pour employer une expression utilisée par Fillon au moment où a éclaté le Pénélopegate.
Seul Página/12 se distingue dans les kiosques. La rédaction a même choisi d’envoyer le sujet à la une, à côté d’un autre problème auquel la droite doit faire face : après la manifestation réactionnaire et jusquauboutiste de San Nicolás de los Arroyos (voir mon article du 9 juillet dernier), les différents organismes corporatifs de l’agriculture sont prêts à se scalper les uns les autres.
Hier le délai pour le dépôt des candidatures aux élections législatives de mi-mandat arrivait à échéance. Fâcheuse coïncidence ! Et pendant ce temps-là, Mauricio Macri se trouve bloqué en Suisse, au terme de sa tournée européenne qui l’a mené d’un congrès du Partido Popular en Espagne au siège de la FIFA : l’avion où il avait retenu une place pour rentrer au pays a été annulé dans le cadre des restrictions aux frontières de l’Argentine afin d’éviter l’arrivée de porteurs du variant Delta.
L’ancien secrétaire d’État au Sport des gouvernements Kirchner mari et femme, aujourd’hui député, a écrit au président de la FIFA pour lui demander de retirer à l’ex-chef d’État argentin sa charge à la tête de la Fondation de la dite FIFA comme conséquence du scandale bolivien. Or donner suite à cette lettre serait ne faire aucun cas de la présomption d’innocence de Macri et on voit mal Gianni Infantino capituler aussi vite en retirant à son pote argentin la protection qu’il lui a offerte avec ce prétexte en or pour parcourir le monde et développer son réseau parmi les dirigeants politiques de la planète.
© Denise Anne Clavilier www.barrio-de-tango.blogspot.com
Pour aller
plus loin :
lire l’article de Página/12 sur les nouvelles déclarations de l’ancien ambassadeur