« l’inaccomplissement tient le coeur
« sans égard pour le réel
« tu écris dans un angle
« la définition et l’usage »
Ces quelques vers presque à la fin d’un livre publié en 1997, Les natures indivisibles, semblent ouvrir une voie vers celui qui vient de paraître : L’usage et les attributs du coeur.
De livre en livre, depuis Le Renversement (1972), je trouve dans les poèmes de Claude Royet-Journoud des arbres, parfois « coupés d’horizon », des corps, des draps, le chiffre trois, des mots qui font apparaître jusque dans les silences qui les lient et les rendent visibles la trace d’un récit, seulement la trace, qui m’y invite. Dans les premiers livres, le vers est souvent séparé, isolé sur la page, s’offrant un profond soupir ou une pleine respiration. Puis des textes plus longs, entre parenthèses ou entre crochets sont apparus, situant les vers dans ce mouvement plus ample de la narration, révélant une musique antérieure, faite de voyelles, de consonnes et d’une sorte de grammaire instaurant une distance multipliée par un subtil jeu de miroirs qui le laissent « seul entre deux images » ou dans « la fente d’une image ». Ces images pourraient n’être que les reflets vifs de la lame d’un couteau quand elle « divise le ciel ». Couteau déjà vu dans d’autres livres de Claude Royet-Journoud et dont la citation de Jackie Pigeaud, en quatrième de couverture, dit l’usage : « l’anatomie, c’est-à-dire l’action de couper pour voir ».