May Fly
Auteur : Gérard Coquet
Éditions : Jigal (20 Mai 2021)
ISBN : 978-2377221325
260 pages
Quatrième de couverture
Salvatore Bonato est un homme prudent et matois qui a toujours géré sa vie en bon père de famille. Mais est-il possible d’en être un quand on est le comptable du terrorisme et que l’on vient d’en détourner les fonds ? Devant le monstre qu’il a réveillé, il choisit de se placer sous la protection de la police, accepte de livrer ses secrets, mais pose une condition : que Ciara McMurphy recueille sa confession.
Mon avis
L’Irlande est une terre tout en contraste. Le soleil vient très vite après la pluie. On y aime autant qu’on déteste, fort, sans concession. On ne sait pas forcément à quoi s’attendre car c’est une île vivante, vibrante, imprévisible, tumultueuse, sauvage … Ce roman lui ressemble, et c’est pour ça qu’on l’aime.
C’est sur l’île de Inishbofin, proche du Connemara que nous entraîne Gérard Coquet. Pas pour écouter des balades, boire une Guinness, ou taquiner la truite. On est en Novembre, les jours sont courts, le brouillard est bien présent. Chacun mène sa petite vie. Et puis un coup de tonnerre, comme un éclair en plein orage et alors tout change. Salvatore Bonato, un truand, qui s’occupe des finances du terrorisme, a peur. Il a détourné des fonds et sa couverture de père de famille ne va pas résister longtemps. Il ne peut pas, seul, lutter contre ce qu’il a soulevé. Après réflexion, il décide de demander protection à la police. En échange, il livrera quelques confidences. Par contre, il met une condition : être interrogée par Ciara McMurphy sur l’île de Inishbofin. Le lieu ne va plus être aussi calme…
Ciara a démissionné. Elle prépare une mouche May Fly pour aller pêcher lorsqu’on la dérange pour lui expliquer la situation. Elle n’a aucune envie de reprendre du service. On ne lui laisse pas le choix et elle va se retrouver face à Salvatore. Il lâche les informations par bribes, joue au chat et à la souris avec elle. Il semble savoir des choses sur sa vie personnelle mais il fait durer et ne dit rien. Ciara est une fougueuse, impatiente, elle s’énerve mais elle est bien obligée de s’adapter si elle veut des réponses.
« Le passé et l’avenir. Fallait-il connaître le premier pour mieux vivre le second ? »
Il faut remonter loin pour comprendre ce qu’il se passe « ici et maintenant ». Le lecteur découvre pas à pas, les trahisons, les mensonges, les non-dits, les liens. Blanchiment d’argent, financements pas nets, Salvatore Bonato a peur. Il a beau s’être réfugié auprès des autorités, il se sait poursuivi et pas par n’importe qui. De plus, il n’ignore pas que la protection policière va avoir des limites. Il faut sans arrêt qu’il lâche un peu de lest mais pas trop pour ménager tout le monde. Celui qui gêne peut disparaitre très vite dans le brouillard, un champ de tourbe, ou l’eau glacée d’une rivière.
C’est violent, noir, profondément ancré dans tout ce qui attise les rivalités des gangs : guerre de territoires, violence qui va crescendo, jalousie, chantage….. Porté par l’écriture puissante et ferme de l’auteur, le récit est complet. Le ton grave est parfois plus apaisé par une petite scène, une allusion plus douce qui permet de souffler.
Malgré la noirceur, j’ai beaucoup aimé ce roman. L’auteur nous présente des personnages variés, dont certains ont le verbe haut, les scènes sont très visuelles, et surtout Ciara et l’Irlande ont un charisme indéniable, sans doute parce que Gérard Coquet sait les mettre en valeur.