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une bouteille remplie d'eau de mer

Publié le 31 août 2021 par Paulo Lobo
une bouteille remplie d'eau de mer

Moment 1

Me voici debout sur la plage, je regarde l’océan immense, me demandant quel sera mon avenir. Me voici arpentant les rues de la grande ville, le cœur léger et l’esprit ouvert, heureux devant tout cette vie jaillissante, bourdonnante, ruisselante. Me voici dans un ailleurs qui se trouve dans mon passé, depuis si longtemps passé. J’essaye de revenir en arrière, par la pensée de voyager dans le temps, j’essaye de voir le lieu, de sentir le lieu, de tâter le lieu, les couleurs la lumière les matières, moi. J’essaye de trouver un couloir aérien pour vite m'évacuer, partir, échapper au joug des jours. L'éternel adolescent a dit son dernier mot depuis longtemps. L’éternel adolescent ne lit plus de livres, ne voit plus de films, n’écoute plus de musique. Il se retrouve seul dans un silence infini qui compresse ses poumons. Il a toujours envie de vivre, mais autour de lui l'univers se rétrécit. La beauté est un concept dont il veut se méfier, mais qui parfois continue de l'absorber. Les images qui bruissent dans sa tête, comme des papillons tournoyants et insaisissables. Il n’a pas toujours à la main un appareil, une caméra, un stylo ou un crayon à dessin. Il sait que ses jours sont comptés, mais il ne sait pas exactement comment cela va se passer. Cette incertitude l'interpelle. Depuis longtemps, il sait que le monde tournera encore et toujours malgré lui, avec lui et sans lui, alors il se borne à dire des phrases clairement délimitées, dans un élan sommairement descriptif. 

Moment 2

La lumière tombe sur le paysage qui vient à peine de se réveiller, cela lui fait un bien fou, des contrastes, des ombres et des taches de lumière. Il roule à une allure modérée, ce qui lui laisse le temps d’apprécier la langueur apaisée du monde. Il n’a pas envie de se presser, il sait bien que, d’une façon ou d’une autre, tout est déjà écrit. Il y a comme une main invisible qui dicte ses pas, lui murmure des mots suaves à l’oreille et et lui rappelle qu’il n’a pas trop le choix. Ah, que de vacarme et de hurlements autour des libertés, mais qui détient vraiment les clés ? Il est souvent question de la découverte de soi-même, il n’a jamais voulu se découvrir lui-même, il a toujours eu peur d'être exposé nu aux yeux du monde. Il est pudique. Il sait qu’il ne faut pas tout montrer, tout révéler, il faut toujours garder une part de mystère dans toute chose. Il estime que nous sommes tous sur une scène de théâtre et que tous nous devons assumer un rôle dans la grande pièce de la vie. Tous nous devons être à la fois comédiens, personnages et spectateurs. Et si d’aventure il y en a un qui veut arrêter de jouer pour crier mais bon sang regardez-moi, je suis moi, je ne suis pas le costume qu'on m'a donné, je ne suis pas les mots que le parolier a composés, je ne suis pas le regard que vous portez sur moi. Que se passe-t-il alors, en attendant la prochaine ligne ? On l'écoute poliment et ensuite on continue la scène. Chacun est indissociable de son masque et dans le monde actuel, enlever le masque, cela fait partie aussi du jeu, quoi qu'en pense l’individu qui s’imagine libéré. C’est un grand mystère dans lequel nous sommes embarqués. Et personne ne détient les clés du chemin, on a beau vouloir appliquer un raisonnement scientifique et logique, il y a toujours des imprévus et des zones d’ombre, des choses inexpliquées. Esprit indomptable. Tous pour un et un pour tous. La charrette de la liberté individuelle. Alors ce matin quand tu roulais sur la route et que toutes ces pensées te trottaient dans la tête, tu t'es pris à te réveiller ailleurs. Tu t'es dit, c’est bien la seule chose qu'il me reste, rêver... Mais cette fois-ci, malgré lui, il se sent asphyxié, opprimé, sans aucune issue possible, il ne peut pas être transféré, l'aéroport est miné et bloqué. Il arrête la voiture sur le bord de la route, à côté d’un petit bois composé d’arbres menus et frêles. Il y a le bruit des feuilles caressés par le vent, il y a, semble-t-il, des petits sifflement d’oiseaux. Il y a le ronronnement de cette autre voiture qui passe. Il effectue un rapide check-up. Il écoute, regarde, sent, marche, saute. Tout semble être en parfait état de marche. Et pourtant il n’a aucune idée de la façon dont il va pouvoir continuer son chemin, son voyage et sa phrase au sujet d’un ruisseau qui se trouverait pas très loin. Il essaye de se rappeler qui est l’auteur de l’histoire dans laquelle il se trouve enchaîné. Le nom ne lui revient pas. Il essaye de faire une bulle et d’écrire dedans. comme une bouteille dessinée et jetée à la mer.



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