J’aimerais que tout le monde lise ce livre. C’est la phrase que j’ai prononcée à la fin de ma lecture.
Kaoutar Harchi y est « à la fois l’objet, le sujet et le témoin ». Elle s’adresse à nous : « voyez », écrit-elle, « et regardez ». Elle commence avec le film du mariage de ses parents, film les montrant avant qu’elle naisse, avant qu’ils quittent le Maroc, quand tout paraissait simple. Puis c’est l’école, c’est-à-dire la décision prise par ses parents de l’inscrire d’abord dans une école de l’autre côté de la ville, et ensuite dans une école catholique : il s’agissait d’éviter les « mauvaises fréquentations ». C’est l’âge où elle attend les modifications de son corps avec une certaine impatience. Et c’est aussi le moment où elle rencontre le racisme sous plusieurs aspects. Et notamment la mort d’Ahmed dans un commissariat. Puis celle de Zyed et Bouna à Clichy, qui mobilise tant de monde, pas seulement des jeunes de la banlieue parisienne, des parents aussi, des mères, dans cette ville de l’Est de la France où elle habite. Et c’est parfois la honte, parfois la colère. Jusqu’au jour où elle découvre des livres d’Abdelmalek Sayad, un sociologue, à la bibliothèque municipale. Et elle y trouve motif de joie. « Les grands auteurs offrent cela ». La sociologie lui ouvrira cette possibilité de tuer la honte pour toujours. Et elle se met à écrire, écrire comme une transgression, écrire pour être lue.