Erri de Luca signe le récit qui fait le roman graphique intitulé L’heure H, pour ne plus jamais baisser la tête. Il le fait avec Cosimo Damiano Damato et Paolo Castaldi. La traductrice est Danièle Valin.
Les premières images montrent la violence qui déracine les arbres et détruit les maisons de bergers de cette Italie du Sud pauvre à qui l’entreprise Italsider promet le progrès. Mais la violence ne s’arrête pas à la nature : on compte plusieurs centaines d’ouvriers morts sur les chantiers, dans les travaux souterrains… Et la question se pose très vite, parmi les militants de Lotta Continua : faut-il aussi tuer ceux qui nous tuent ? Ou faut-il s’efforcer de les convaincre ? Ces questions ont toujours hanté les révolutionnaires.
On les retrouve dans un autre livre d’Erri de Luca : Impossible (éd. Gallimard). Un des personnages, interrogé par un magistrat, fait remarquer qu’on parle d’accidents du travail quand les morts au travail sont le résultat de mauvais traitements patronaux, et qu’on devrait sans doute parler de crimes et de culpabilité.
Le roman graphique explore cette période (1960-1970) en s’appuyant sur le journal Lotta continua.
Les dessins sont remarquables, peu de couleurs mais des touches d’aquarelle et des portraits auxquels on s’attache. Sara, d’abord, la militante qui porte le journal et mène ensemble réflexion et action, Sebastanio son compagnon, et les ouvriers.
C’est une période qu’a vécue Erri de Luca, en acteur et en témoin. La lutte continue puisque le capitalisme démontre aujourd’hui encore le peu de cas qu’il fait de la vie humaine, de la nature même.