Si vous me suivez également sur mon compte Instagram « literature_travels » (ici), vous devez déjà savoir que j’ai récemment lu le premier tome de la saga familiale de Catherine Bardon « Les déracinés ». J’ai enfilé les 750 pages du format poche en à peine plus d’une semaine tellement j’ai été embarquée par l’histoire dramatique (mais aussi romantique) de Wilhelm et Almah et plus globalement de la famille Rosenheck.
Le livre : « Les déracinés » – Tome 1 (ici)
Crédit photo : L&T
L’autrice : Catherine Bardon est une écrivaine française. Amoureuse de la République Dominicaine, elle a écrit des guides de voyage et un livre de photographies sur ce pays, où elle a passé de nombreuses années. Elle vit à Paris et signe avec « Les Déracinés » son premier roman.
Le résumé : « Almah et Wilhelm se rencontrent dans la Vienne brillante des années 1930. Après l’Anschluss, le climat de plus en plus hostile aux juifs les pousse à quitter leur ville natale avant qu’il ne soit trop tard. Perdus sur les routes de l’exil, ils tirent leur force de l’amour qu’ils se portent : puissant, invincible, ou presque. Ils n’ont d’autre choix que de partir en République dominicaine, où le dictateur promet 100 000 visas aux juifs d’Europe. Là, tout est à construire et les colons retroussent leurs manches. Pour bâtir, en plein cœur de la jungle hostile, plus qu’une colonie : une famille, un avenir. Quelque chose qui ressemble à la vie, peut-être au bonheur… »
Mon avis : L’histoire débute en Autriche à l’aube des années 1930. On y découvre notamment Wilhelm un jeune viennois passionné par le journalisme et plus généralement par l’art et la littérature (Stephan Sweig est son idole). Il fréquente les cercles d’intellectuels et refait le monde, avec ses amis, jusqu’à des heures tardives de la nuit, attablé dans les cafés enfumés de la capitale.
C’est alors qu’il couvre un vernissage pour le journal dans lequel il travaille qu’il fait la connaissance d’Almah. Si sa beauté diaphane l’attire tout de suite ce sont son espièglerie et sa force de caractère qui finiront de conquérir Wilhelm.
Les deux jeunes gens évoluent, dans un premier temps, dans une Vienne qui fourmille de créativité, dynamique, luxueuse. La capitale rappelle la puissance de l’Autriche d’autrefois. Malheureusement le tableau s’assombrit bien vite, et pas qu’un peu, avec l’arrivée d’Hitler dans l’Allemagne voisine. Les tensions politiques parviennent jusqu’en Autriche et le climat est de plus en plus délétère.
On assiste à tout cela à travers les yeux de Wilhelm et sa famille qui ont du mal à réaliser (et à croire) ce qu’il se passe. C’est impuissants qu’ils vont devoir affronter l’Anschluss accompagnée des lois anti-juifs, des exactions et humiliations et, bientôt, des déportations.
La seule issue possible reste alors l’exil. Mais pour aller où ? Si les Etats-Unis sont, naturellement, visés. Le pays se transforme rapidement en un Eldorado inaccessible. C’est le début d’une longue et douloureuse errance pour la famille Rosenheck.
Un espoir leur sourit peut-être avec la création, à l’autre bout du monde, en République Dominicaine, d’une sorte de kibboutz, une communauté agricole auto-suffisante, petite enclave juive au sein de ce pays d’Amérique latine qui est sous la dictature de Trujillo et qui offrira à ces réfugiés une terre d’asile afin de redorer son image, de relancer l’économie du pays et de « blanchir » la population. Un accueil pour couvrir d’autres discriminations et exactions : celles des haïtiens.
C’est tout particulièrement pour le personnage d’Almah que je me suis prise d’affection, mais il est également difficile de ne pas s’attacher à Wilhelm qui nous raconte, pour partie, son histoire.
Catherine Bardon nous donne une image, que j’ai trouvé, très nette de cette Vienne resplendissante d’autrefois. Elle retranscrit avec pudeur et émotions le déchirement des adieux à une ville, une ère, des proches…
Le déracinement est, naturellement, le thème central du roman. Pourquoi notre identité est-elle si liée au lieu d’où l’on vient ? Peut-on se reconstruire après un exil si définitif et brutal ? Ces questionnement sont vraiment intéressants.
De la même façon que l’histoire d’amour épique et sensuelle de Wilhelm et Almah qui fait, forcément, battre nos coeurs de lecteurs.
J’ai également trouvé appréciable de découvrir un autre pan de cette tristement célèbre période de notre Histoire commune. En effet, je n’étais que très peu familière avec les actions des organisations juives qui ont, à cette période et avant la création de l’Etat d’Israel, oeuvré pour créer, aux quatre coins du monde, des enclaves destinées à accueillir la communauté. Des pays miniatures pour remplacer ceux qui ne voulaient plus d’eux.
Tout est extrêmement bien documenté par Catherine Bardon et référencé en bas de page ainsi qu’à la fin du roman. On sent que la romancière a fait beaucoup de recherches sur l’ensemble de ces évènements.
Je dois admettre qu’il y a tout de même quelques longueurs dans ce premier tome et la vie des personnages nous est parfois rapportée avec beaucoup trop de détails. Certains passages auraient assurément pu être supprimés. Ceci étant dit, cela permet aux lecteurs de s’immerger dans la vie des personnages, de se familiariser avec leur environnement. Par ailleurs, la plume de la romancière parvient à maintenir notre intérêt tout du long de cette histoire très émouvante.
En bref : Une très belle découverte et j’ai hâte de poursuivre la lecture de cette saga familiale avec le second tome qui aura, je crois comprendre, un tout autre décor.
Vous avez entendu parler de cette saga ? Vous avez envie de la lire ? Si c’est déjà fait, qu’en avez-vous pensé ?