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Le boxeur manchot de Tennessee Williams

Par Sylvie
ETATS-UNIS -Années 40-50
Le boxeur manchot
Editions Robert Laffont, collection "Bibliothèque Pavillons"
Tennessee Williams (1911-1983) est surtout connu en tant que dramaturge ; ses pièces sont devenues célébrissimes grâce à leurs adaptations cinématographiques : Un tramway nommé désir, La chatte sur un toit brûlant, Soudain l'été dernier; autant de variations sur l'inconscient et la folie humaine.
Son théâtre fit oublier qu'il fut un nouvelliste hors pair. Ce recueil le consacre pour moi comme l'un des plus grands écrivains américains.
Dans chacune de ces nouvelles, on retrouve le goût de Williams pour les marginaux : des poètes, des vierges folles, des saintes, des vagabonds vivent en dehors de l'ordre social et en payent pour cela le prix de leur vie. Williams les rend éternels, les sanctifie ; la méthophore christique est souvent présente signifiant l'expiation des péchés du monde par les marginaux.
Il y a d'abord ce boxeur manchot ; un magnifique adolescent qui s'engage dans la marine, devient champion de boxe puis perd son bras ; maudit, il sombre dans la prostitution et commet un meurtre. Arrêté, il découvre la douceur des sentiments et des regrets. Martyr moderne, un prêtre adoucit ses derniers instants...Un ouvrier marginal n'a plus que pour compagne une chatte trouvée dans la rue. Un poète parle aux enfants rassemblés sur la plage...Une vierge sexagénaire vit ses premiers émois avec un jeune écrivain dans un hôtel méxicain...Un blanc timide se fait masser de manière masochiste par un masseur noir...
Dans toutes ces histoires, il y a certains motifs récurrents comme dans le théâtre de Williams : l'homosexualité latente (la relation ambigüe entre le boxeur et le prêtre, le masochisme mortel entre le timide blanc et son masseur noir), la sexualité refoulée, la solitude tragique des poètes, la névrose...
Ces marginaux sont érigés en martyrs : la solitude, la folie deviennent des vecteurs de poésie intense ; on pense tout particulièrement aux Poèmes en prose de Baudelaire. La douleur, le tragique deviennent Art. Si la mort vient clôre rapidement la vie de ces errants, c'est pour mieux les rendre éternels. La prose de T. Williams est profondément humaine : il brosse des portraits cruels et fraternels de ces frères humains qui prennent leur envol vers la sainteté des esseulés.

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