Traduit du danois par Andréas Saint Bonnet
J’ai découvert Jorn Riel et ses truculents racontars en 2008, et je me suis ensuite régalée avec leurs adaptations BD. Cet été, le thème de l’exposition photo du festival de La Gacilly était Plein Nord. J’ai donc tout naturellement craqué pour ce livre en rentrant dans la librairie La grande évasion, qui a ouvert là-bas. Mais attention, ici Jorn Riel ne nous emmène pas dans un Groenland qui tiendrait autant du rêve que du fantasme. Jorn Riel raconte ici sa vie. Et comme il ne se refait pas, il nous la raconte un peu à la manière de ses racontars. Pour être honnête, avec ses premièrs textes, j’ai cru ne pas m’enthousiasmer pour cette lecture, qui avait un peu trop des accents de réalisme. Puis, peu à peu, les souvenirs de Jorn Riel se sont mêlés à mes souvenirs de lecture et j’ai aimé découvrir comment il avait, en quelque sorte, sublimé ses expériences dans ses célèbres racontars, mais à quel point aussi ils étaient proches de son propre vécu, parfois ahurissant. J’ai aimé par exemple, refaire connaissance avec ces hommes solitaires, qui n’aiment rien tant que recevoir de la visite, parler, et s’inventer des fiancées imaginaires. J’ai aimé les balades en traineau que Jorn Riel qualifile d’expériences à la fois douloureuses et merveilleuses. J’ai aimé lire de nouveau cette crainte du Vertigo, cette solidarité qui unit les hommes confrontés aux dangers de l’ours polaire, aux dangers du froid. Aux côtés de Jorn Riel, nous cotoyons un monde passé, différent, et totalement éloigné de notre quotidien d’aujourd’hui. Et c’est à la fois dépaysant et dérangeant, tellement notre manière de vivre nous semble en général la norme. Un savoureux moment de lecture qui m’a donné envie de renouer avec Jorn Riel, sans trop tarder.
« Quand on a passé trente-huit ans en expédition, on a forcément vécu des expériences différentes de celles d’un homme resté tranquillement chez lui. Et il arrive, en compagnie de quelques bons amis, que je me laisse aller à raconter une histoire, et bien entendu, je m’efforce alors de la raconter telle quelle, sans rien ajouter ni enlever. Enfin, dans les grandes lignes. »
Editions 10/18 – novembre 2016
J’ai aimé ce livre, un peu, beaucoup…