Magazine Beaux Arts

Patrick van Caeckenbergh

Publié le 02 juillet 2007 par Marc Lenot

à la Maison Rouge, jusqu’au 16 Septembre.

C’est une recréation du monde à laquelle cet artiste flamand nous convie, un monde bien à lui, à sa mesure. On le sent avide de tout savoir, de tout comprendre, de tout emporter, dans sa tête, sur son dos. Il est encyclopédique, obsessionnel, sériel. Sa maison à vivre, Living Box, qu’il a réellement construite quand il squattait une usine désaffectée et dans laquelle il a installé son lit, son bureau, son salon, son débarras, est l’équivalent de la coquille de l’escargot ou de la tortue, deux animaux qui peuplent son univers : comment transporter avec soi tout ce dont on a besoin en permanence ? Un landeau-escargot (ci-contre une autre version) et un cheval de roulotte fait de boîtes de conserves répondent à la même interrogation de nomadisme confortable. J’avais vu de lui il y a 15 ans à Gand un immense Chapeau en bois, qui s’ouvrait et révélait des dizaines de tiroirs dans lesquelles était stockée toute une encyclopédie. Cette même encyclopédie, on l’aperçoit ici dans le Clapier, encore une petite maison à tiroirs. Cette manie de la classification me fait penser à Charles Fourier qui avait identifié 12 passions, 810 caractères et 72 types d’adultère.

La Tortue porte sur sa carapace une carte du ciel et des constellations, l’une d’elles se nomme Sculptor. A l’intérieur de la carapace, l’artiste nu pile des amanites : divination, transe, poison, danger. Dans l’antiquité chinoise, les carapaces de tortue étaient des vecteurs de divination par scapulomancie. Quelqu’un sait-il comment naissent les bébés tortues ?

Tout autour des murs de la pièce, sur des étagères, de petits rectangles de couleur plus ou moins rose, plus ou moins noire : c’est une Collection de peaux. Patrick van Caeckenbergh, achetant un jour chez un marchand de couleur un pot de peinture “couleur chair” se demanda comment un Noir réagirait devant cet échantillon de couleur. Ces centaines d’échantillons de peau sont lisses et propres, à peine si, ici ou là, on y distingue un pli, un poil, l’ombre d’un téton. Je me souviens aussi d’un Vitrail d’église fait de sexes et de seins; il y avait inscrit pour nous un prémonitoire ”sois prudente, ma fille !”.

Il y a enfin ici des pièces très conviviales, rappelant les communautés flamandes de Brueghel : une salle à manger où il fait déguster une soupe au homard, un dais aux formes arrondies sous lequel les vieux du village promènent les petits lors de la fête paroissiale.

C’est un monde fabuleux, drôle et obsessionnel, qui incite à la mélancolie (moi, en tout cas, ce jour là). Allez aussi voir de lui, au dernier étage du Musée de la Chasse et de la Nature, récemment ré-ouvert (et qui accueille plusieurs belles pièces d’art contemporain, bien dans l’esprit des lieux), l’Atlas d’une cosmogonie, une grande construction qui relève du retable religieux et de la baraque foraine. Et ne manquez pas ses livres pleins de surprises (photos scannées depuis ses livres, désolé pour le pli central).

Par ailleurs, toujours à la Maison Rouge, une très belle peinture de Felice Varini, 14 triangles qui, une fois le point focal atteint, génère en vous un sentiment tout à fait léger et énergisant.


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