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(Note de lecture) John Keats, La poésie de la terre ne meurt jamais, par Claude Minière

Par Florence Trocmé


C’est [la poésie] une puissance à moitié assoupie sur son bras droit

John Keats  la poésie de la terre ne meurt jamais
Vous voyez l’image, précise, le monde qui s’étend autour du corps ? Ce peut être un cauchemar ou une merveille, le sommeil de la raison ou sa lucidité exaltée…Le vers (portant l’une des définitions que lance sur le moment John Keats) appartient au long poème Sommeil et poésie (1816). Il est caractéristique du « positionnement « du poète, qui ne parle pas depuis un point fixe, constant, mais accompagne les choses de ce monde, des plus grandes aux infimes, entre permanence et brièveté, splendeur et fragilité. La poésie « doit être une amie qui allège les soucis et élève les pensées de l’homme » --- mais l’est-elle ? « En vérité la puissance du chant nous a donné d’étranges tonnerres ». Je pensais recopier, dit le poète de 21 ans, « maints vers ayant une influence si étrange Que nous nous demandons toujours d’où et comment Ils sont nés. »
Les éditions poesis ont produit un volume finement dessiné, composé d’extraits de la correspondance de John Keats puis d’un choix de poèmes. Conception judicieuse, bipartition active. La poésie de la terre ne meurt jamais ; lui, John, atteint de tuberculose, sait qu’il va mourir (à Rome, où il tentait d’échapper à son mal, en 1821).
En France, en cette année 1821, où en sommes-nous ? Sous la Restauration et Louis XVIII, Napoléon ayant été défait par Wellington. Dans une lettre à sa sœur Fanny, en août 1819, le poète disait : « je peux passer un été très calmement sans beaucoup me soucier du gros Louis, du gros Régent ou du duc de Wellington. » Dans l’été ou en hiver, dans la région des Lacs ou dans le jardin d’Hampstead, demeure l’intelligence du paysage, sa tonalité intellectuelle : « Ce qui m’étonne  plus que tout le reste, c’est la tonalité, la couleur, l’ardoise, la pierre, la mousse, le varech ; ou, si je puis m’exprimer ainsi, l’intelligence, l’expression de ces endroits. » (Lettre à son frère Thomas, juin 1818).
Le lecteur pensera peut-être à un autre anglais, G. M. Hopkins. La mobilité de Keats est extrême, il est capable de l’anecdote (Pourquoi ai-je ri ce soir ?) comme de la légende (Ode à une urne grecque) :

« La Beauté est vérité, la vérité Beauté --- c’est tout
Ce que tu sais sur terre et tout ce que tu as besoin de savoir »

Plutôt qu’anéantir, choisir.


Claude Minière

John Keats, La poésie de la terre ne meurt jamais, traductions de Thierry Gillyboeuf et Cécile A. Holdban, avant-propos de Frédéric Brun.  Editions Poesis, 2021, 122 p. 16€


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