Publié dans AOC (Analyse, Opinion, Critique) fin mai 2020, le texte de Céline Curiol raconte une surprenante épidémie dont la cause et le véhicule serait la parole prononcée. Il faut donc que les gens se protègent les oreilles, les villes sont toutes peuplées de personnes dont la tête est coiffée d’un casque. Les personnes atteintes souffrent de maux de tête et répètent en boucle un seul mot, celui qui les a infectées. Mais comment déterminer les mots-pathogènes ? Il faudrait remonter dans toutes les paroles entendues par les victimes dans les semaines précédentes. Impossible. L’hypothèse, c’est que les « mots malheureux » ne sont pas les mots quotidiens (bonjour, au revoir, merci…) ni les mots rares. Toujours est-il que les voix se sont progressivement tues, sauf à se parler à soi-même dans la solitude, mais, dans ce cas, le manque d’une autre voix se fait douloureusement sentir. Reste alors une solution : la lecture, « une manière d’entendre encore quelques voix même silencieuses ».
(à suivre)