Le titre de la chronique s'inspire de 4 albums que j'ai tant écouté dans ma vie que j'en connais chaque sons, chaque paroles, chaque nuances, chaque textures, cette musique est même composante de mon ADN.
Par ordre de création:
Blonde on Blonde de Bob Dylan
The Idiot d'Iggy Pop
Low de David Bowie
The Unforgettable Fire de U2.
B.I.B.I. c'est moi. C'est aussi la terminaison du mot habibi, voulant dire en langue d'Irak, Je t'aime.
Musique, je t'aime.
SUPERFLY de Curtis Mayfield.
Curtis Mayfield avait déjà été crédité d'avoir écrit la chanson des chansons des droits civils, aux États-Unis, alors qu'il était dans la formation The Impressions. En solo, depuis 1970, il a lancé trois autres albums. Deux albums studios qui ont connu du succès, surtout le premier et un album en spectacle. Il est largement admiré car sa musique est positive, ensoleillée, enjouée, intéressante pour toute une génération de jeunes de années 70, particulièrement la communauté d'humains à la peau noire qui reconnaît beaucoup de bienfaits dans ce que chante Mayfield de sa voix de falsetto. Il se pose entre autre comme anti-drogue. Ce qui rend son nouveau projet de 1972, un peu oxymore.
Superfly est un film de Blaxploitation de Gordon Parks Jr mettant en vedette Ron O'Neal, un dealer de cocaïne. C'est le héros du film, ce qui plaçait étrangement Mayfield, chantre de l'anti-drogue, dans une position assez ambigüe, soit celle de signer la trame sonore d'un film qui n'en faisait pas nécessairement la promotion, mais qui ne la condamnait pas non plus.
Mais le choix de Curtis Mayfield, pour cette trame sonore, est très inspiré. Le film Shaft, deux ans plus tôt est un tel succès, les producteurs veulent battre le fer pendant qu'il est chaud. Non seulement Mayfield réussit à signer une trame sonore qui ne valorise aucunement la drogue, mais le funk, le groove, le rythme, les parties instrumentales, la narration choisie par Mayfield, tout est si parfait que plusieurs s'entendent pour dire qu'il n'est pas nécessaire de voir le film, Mayfield l'illustre si bien qu'on l'entend et le voit facilement dans nos têtes. Mêmes les morceaux instrumentaux sont excessivement bien "tournés".
La trame sonore de Mayfield est construite un peu comme l'album magique de Marvin Gaye What's Goin On', lancé 13 mois plus tôt. L'influence est directe. Et si l'album de Gaye est davantage un album concept ressemblant à un seul morceau qui plane d'une plage à l'autre presque d'un même souffle, Mayfield, bien que tout aussi planant, offre des morceaux plus découpés les uns des autres. Et franchement agréables. Mais tout aussi concepts puisque reliés au film de Parks Jr.
Il distille suffisamment de gris dans le soleil de sa voix pour qu'on sente la ville (sale) et est suffisamment habile pour exploiter le film, et non se soumettre aux thèmes illicites que ce film traitait avec une légèreté permissive. On comprend même que ce qu'il chante, est une condamnation voilée. Tout en se gardant loin de la scolaire moralisation.
Un des morceaux raconte l'histoire d'un disparu au coeur bon, au mauvais endroit, au mauvais moment, dans le mauvais rôle du pusher. Ce morceau, en single, vendra plus de 2 millions de fois, en Amérique du Nord. Un autre est une métaphore de l'homme d'affaires dans le rôle du pusher. La chanson titre parle de leur univers comme de celui de parieurs ou de joueurs de casinos.
Ironiquement la trame sonore qu'offre Mayfield est pleine de finesse lyrique, enrobée dans une musique caramélisée, à coups de guitare wah-wah et de cuivres, parfois synthétisée. Cette simple trame sonore (suivant le succès de Shaft) a créé un genre en soi, la trame sonore de film de blaxploitation. Mayfield recevra beaucoup d'offres du même genre par la suite.
Cet album explore des grooves sombres avec des sons éclairés.
Pour amateurs de funk, de soul, de pop, de dance, de cuivres, de sons de blaxploitation, de voix de falsetto, de Marvin Gaye, de smooth, uptown, psychedelic, Chicago soul.
Pour amateurs de bonheur au service de thèmes sombres, mais aussi ensoleillables.
Cet album a cette année, 50 ans.