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Antigone à Molenbeek

Publié le 25 avril 2022 par Adtraviata
Antigone à Molenbeek

Présentation de l’éditeur :

Antigone à Molenbeek est une réécriture du célèbre mythe de cette jeune femme, fille d’Œdipe et de Jocaste, qui tenta jusqu’à la mort d’enterrer son frère, Polynice. Transposée dans l’actualité politique contemporaine, cette figure du dévouement s’incarne dans une sœur dont le frère a commis un attentat suicide à la bombe.

Stefan Hertmans dévoile la complexité des sentiments de cette Antigone moderne, livrée au mépris, empêchée, elle aussi, de rendre les derniers hommages à son frère. Bien loin d’en faire un cas d’étude, l’auteur révèle nos contradictions face à un sujet à la fois politique, social, et humain avant tout.

Dans cette réécriture du mythe d’Antigone, Stefan Hertmans en fait une jeune femme de Molenbeek, commune de l’entité bruxelloise qui, malgré tous ses efforts, restera longtemps marquée comme une des bases arrière des attentats de Paris et de Bruxelles en 2015 et 2016. Le frère de Nouria a commis un attentat suicide et elle veut à tout prix l’enterrer dignement. Mais les autorités, en la personne de l’agent de police Crénom – tout un symbole, ce nom ! – refusent de remettre le corps du jeune homme. Comme Antigone, Nouria va s’opposer par tous les moyens à cette décision : d’abord par la négociation puis en tentant de voler le corps à l’IML. Brutalement arrêtée, elle va subir la prison et les rebuffades de tous, jusqu’à son avocate, résolument du côté du pouvoir.

S’il y a de nombreux points de ressemblance avec le mythe original, il y a pas mal de différences aussi : pas de soeur, pas de fiancé, et surtout cette revendication de Nouria qui peut heurter le lecteur. Réclamer le corps d’un terroriste pour l’enterrer dignement, est-ce acceptable ? Stefan Hertmans nous répond en partie en citant des statistiques officielles à la fin du livre mais son texte ciselé, fait pour être proclamé au théâtre ou tel un slam, nous laisse avec cette question. Il a le mérite de nous faire ressentir avec lucidité le sort réservé aux terroristes en prison : l’isolement complet, la lumière en permanence, la perte de repères. Et rien que pour cela – bien entendu, je ne cautionne en rien les actes terroristes – ce texte vaut la peine d’être lu.

« Y aurait-il une corde à tresser
dans ce drap blanc comme un suaire ?
Y aurait-il un crochet salvateur
tout en haut de ce mur sans fenêtre,
une sortie, une sortie de secours à travers le mur,
en dernier ressort, loin de ce maudit sort ? »

Stefan HERTMANS, Antigone à Molenbeek, traduit du néerlandais par Emmanuelle Tardif, Le Castor astral, 2019


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