Je le dis depuis des années. La télé exige de nos jours des absurdités. Je l'ai souvent dit avec ironie: est-ce qu'on approche du jour où parlera de l'intensité d'un incendie en plantant un(e) journaliste au coeur de celui-ci pour constater, de visu, que c'est spectaculaire ?Dans le même ordre d'idée, POURQUOI faut-il toujours placer la personne qui parle de météo, dehors, dans la tempête, sous la pluie, le cheveux dans la tornade, pourquoi pas en bikini sur la plage ou en train de se bronzer pour être la continuité logique, si la météo le commande ? On est pas cons! On comprend qu'il fait chaud si on ne vit pas en dessous d'une roche. Qu'il neige si on ne vit pas dans une grotte. Qu'il pleut si on ne voit pas madame se faire revirer le parapluie par le vent.
Les journalistes ont la vie dure depuis plus de 2 ans avec la pandémie. Les moins équipés intellectuellement les taxent de véhiculer du faux, ce qui est toujours composante du journalisme, qui, si il est pratiqué responsablement, garde le faux éphémère et se rétracte, réajuste. Comme un gouvernement qui vit une pandémie pour la première fois en 100 ans. On se trompe, on est humain, on fait preuve d'humilité et on corrige.
Mais se tirer dans les conflits de guerre, je peine encore à trouver cela vraiment courageux tout le temps. Si il faut porter un casque et des gilets, pare-balles, ce n'est plus du journalisme prudent. Et je n'ai pas beaucoup d'admiration pour ce genre de témérité. J'ai adoré les reportages de Tara El-Tarasco et Marie-Eve Bédard, mais quand j'ai vu cette dernière se filmer casquée et avec gilet pare-balle, j'ai ri. T'as pas besoin d'être au coeur du feu pour m'en parler. Je peine à avoir beaucoup de respect pour la témérité.
C'est ce qui est arrivé à la journaliste d'Al-Jazeera, Shireen Abu Akleh, une Femme formidable, au mauvais endroit, au mauvais moment.



C'est Israël qui l'a tuée, avant-hier. Alors qu'elle tentait de faire un micro. Trop près du feu de la guerre. Casquée et avec veste pare-balles. Ce qui n'était pas assez. Une balle l'a atteinte mortellement. Je dirais que ça m'a fait moins de peine que mis en colère. Contre elle, pour les raisons évoquées plus haut. Mais aussi contre la profession et ces exigences. Contre Israël et ses abus. Toujours difficiles à digérer. Les excès Palestiniens sont aussi intolérables. Mais viser les pigeons voyageurs ? Tenait-on aussi à prouver par mille que la première victime d'une guerre est toujours la vérité ?


Des funérailles nationales ont eut lieu jeudi. Elle a été enterrée vendredi. Aujourd'hui, on pleure son souvenir.
On pleure l'impuissance palestinienne.
