Je n'ai eu un jardin que très brièvement dans ma vie et c'est un grand regret. Du coup j'aime les livres qui en parlent surtout quand ce livre est l'histoire d'une femme qui a réalisé un magnifique jardin mais que celui ci peu à peu va lui échapper lorsqu'elle voit son corps l'abandonner.
Monte Pisano
Nous sommes en Italie dans les environs de Lucques près du Elle a fait vivre ce jardin avec l'aide d'un maitre du jardin, le botaniste japonais Monte Pisano Pia Pera pratique le jardinage de façon assidue depuis de nombreuses années.Masanobu Fukuoka dont elle applique les principes en créant un jardin " ébouriffé " un jardin où l'on trouve des mauvaises herbes.
Lucques et sa place extraordinaire
Atteinte de SLA maladie neuro dégénérative qui rend les gestes quotidiens comme un Himalaya à franchir, elle va devoir composer avec la maladie.
C'est une confession feutrée, courageuse, elle ne peut plus bêcher, tailler, cueillir fleurs et fruits. Elle dit subir les mêmes dommages que les plantes sous l'orage
Jardin de Pia Pera
Son jardin est son refuge, son havre de paix. Un lieu où célébrer la nature.
Continuer à l'entretenir est une façon de résister à la maladie, à la mort.
Jardin de Pia Pera
L'ombre d' Emily Dickinson se répand sur le jardin, il y a échange entre la poétesse et la jardinière. Son poème donnera son titre au livre de Pia
" I haven't told my garden yet-
Lest that should conquer me. I haven't quite the strength now To break it to the Bee " " Je ne l'ai pas encore dit à mon jardin - Tant je redoute ma défaillance Pour le moment, je n'ai pas tout à fait la force De mettre l'abeille dans la confidence. "Jardin de Pia Pera
Le jardin devient un personnage auquel elle parle, elle s'épanche à mesure que la maladie la rattrape. Comment accepter ce resserrement des ressources physiques ? Cette sensation que la vie rétrécit ?
" Si, au départ, j'ai pris soin du jardin, accomplissant toutes les tâches en parfaite autonomie, maintenant je dois m'occuper de moi-même. Le temps naguère consacré à tailler, creuser des trous, brûler des branches, piocher, faucher l'herbe m'est dorénavant volé par les soins nécessaires à ma survie. "
Contrainte peu à peu à l'immobilité d'une plante, elle nous ditqu'au-delà de la vie, de la beauté de son jardin toscan, il s'agit " d'accepter calmement d'être quelque chose de petit et d'indéfini, un tout petit point dans le paysage "
Et parfois le découragement est là " Je peux me dessécher, me flétrir, partir en morceaux, et surtout, je ne peux plus bouger à ma guise "
Certains amis disparaissent, l'abandonnent " Il y a de la pudeur devant la perte " Il y a une simplicité dans l'aveu des D'autres au contraire sont devenus plus assidus, plus affectueux." Appuyée sur ma canne - d'abord une, puis deux " défaillances.
La Se souvenir, écrire cet agenda jardinier est source de réconfort." l littérature est un soutien : le Guide des égarés de Maïmonide, les écrits du père Pavel Florenski, la Bible et le Livre de Samuel ou Stevenson.
a mémoire et l'écriture savent faire revivre un monde."
L'auteur est bien consciente que ce sont ses derniers écrits; son écriture est empreinte de " délicatesse, de grâce. Je fais enfin partie de mon jardin, de ce monde fluctuant en perpétuelle transformation. "
La promenade botanique devient essai philosophique.
Cette lecture est une merveille de vérité une belle leçon de courage et de vie car la nature lui offre encore des présents
" Voici les averses puissantes et joyeuses de novembre. Ces trombes d'eaux qui se déversent du haut du ciel me mettent en joie; elles s'accompagnent d'un petit brouillard diffus, emplissant tout l'espace du jardin "
Pia Pera entame son dernier dialogue avec le jardin et invite le lecteur à le partager avec elle.
Le livre : Ce que je n'ai pas encore dit à mon jardin- Pia Sera - Traduit par Béatrice Vierne - Editions Arthaud