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Un fils, une mère, et des sanglots

Par Abdesselam Bougedrawi @abdesselam

RÔLE DU CONTE AU MAROC DANS LES RELATIONS FILS/MÈRE.

UN FILS, UNE MÈRE, ET DES SANGLOTS

Pour beaucoup d’intellectuels marocains, le conte au Maroc n’est qu’un divertissement. Certains l’évoquent avec nostalgie, celle de l’enfance durant laquelle quelqu’un leur racontait ces histoires magiques qui les ensorcelaient.

En fait, le conte au Maroc est plus que cela. C’était une composante majeure de notre éducation, spécialement celle des garçons pour les préparer à s’occuper, plus tard, de leurs mères.

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Dans beaucoup de contes, on trouve une histoire récurrente : une mère vit avec son unique enfant, un garçon. Lorsque celui-ci grandit, il est abordé par une vieille dame qui lui fait rencontrer une jeune femme.

Il découvre l’amour, la passion, délaisse sa vieille mère pour cette ravissante et belle jeune fille. Après un temps de bonheur, il se souvient de sa mère. Il sait qu’elle est seule, qu’elle pleure. Il revient vers elle pour s’en occuper définitivement.

Parmi ces histoires, ma mère me racontait une qui me faisait, à chaque fois, sangloter. Une mère, justement, avait un fils unique. Ils vivaient tous deux dans une sorte d’harmonie et de bonheur. Plus tard, lorsque le fils eut la force, à chaque fête, il sacrifiait le mouton pour sa maman.

Lorsqu’il devint grand, le fils rencontra une vieille femme qui lui apprend qu’il existe une belle jeune femme quelque part au niveau du septième ciel. Pour la conquérir, il doit passer quelques épreuves, à vrai dire, assez magiques. Ce jeune homme passe avec brio tous les défis, s’installe dans un univers digne du paradis avec cette jeune femme, issue de contrées magiques. Les mois passent, les années passent, il se souvient de sa mère et des jours heureux lorsqu’ils vivaient ensemble. Il a la possibilité, à travers une lucarne dans les nuages, de voir la maison où vit encore sa maman. C’est le jour de fête, elle est seule, désespérée, pleurant, un mouton à côté d’elle. Elle répète sans cesse :

Ô mon fils ! Tu es parti, me voilà toute seule. Qui sacrifiera mon mouton ?

Le fils, triste, se jette dans le vide, malheureusement, il meurt quand il arrive au pied de sa mère. Une goutte de son sang sacrifie le mouton de la fête.

Cette histoire, ma mère me la racontait lorsque j’étais enfant. À chaque fois qu’elle le faisait, je sanglotais à chaudes larmes. Finalement, devant mon désespoir, elle a renoncé à me la raconter de façon définitive.

Dans cette histoire, il y a beaucoup de notre âme marocaine, l’amour que portent les garçons pour leur mère. C’est un moyen pour préparer les jeunes fils à ne pas abandonner leurs mères une fois qu’elles sont vieilles et bien pauvres.

Je pense, sincèrement, que beaucoup de jeunes garçons ne sortent jamais indemnes de pareils contes et histoires. Leur principale préoccupation devient, ne jamais laisser tomber leur maman quoiqu’il advienne. S’il est classique de parler de la maman juive, il faudrait également rendre justice aux fils marocains.

Mais, il y a une autre sagesse. Tout l’or du monde, tous les bonheurs de l’univers, ne sont que joie artificielle. Seul compte, cette chose essentielle, ne jamais abandonner celle qui s’est sacrifiée pour nous, notre mère.

Lorsqu’on atteint ce niveau où l’on est complètement convaincu de ce devoir, on atteint une sérénité qui nous rend bien meilleur.

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