Georges Bataille est un jeune homme, étudiant en philosophie, stagiaire à la Banque de France quand Ronald Reagan vient voir le stock d’or de la banque française. Le 15 août 1971, Richard Nixon, président des États-Unis, a suspendu la convertibilité du dollar en or. Quand Reagan arrive, le stagiaire assiste à ce qui ressemble à une cérémonie religieuse, le lingot passant de main en main avant de revenir à la réserve. Cette cérémonie va l’obséder et confirmer ses pensées : l’économie devrait s’occuper de dépense, et le capitalisme la fait reposer sur la dette. Ce n’est pas un traité d’économie. Le jeune homme va être embauché à la Banque de France et affecté à Béthune. Protégé par la responsable de la communication de la banque, il va se lier d’amitié avec le directeur de l’agence et être chargé des dossiers de surendettement. Il y vérifie ses convictions : « La société ne cesse de dépouiller ceux qui n’ont rien ; elle veut, en leur prêtant l’argent qui les asservit, que même les pauvres participent au banquet funèbre de la dette : ce fonctionnement s’appelle l’économie. »
Mais ce Georges Bataille va vivre selon ses propres principes : il s’agit de dépenser, se dépenser, c’est-à-dire de donner et non de s’épargner ni de s’endetter. Et ceci dans tous les aspects de la vie : donner de soi, de son temps, vivre ainsi ses relations sociales, amicales, amoureuses, sexuelles. Par exemple, il va connaître de grandes aventures avec une libraire de la ville, être sollicité pour entrer dans une société de charitables, se rapprocher d’Emmaüs…
Ce n’est pas le Banquier anarchiste de Pessoa, dont il dit ne rien connaître, mais cet homme ne cesse pas d’écrire, sans chercher à publier ce qu’il écrit et sème dans sa maison, voisine de la Banque de France à Béthune, et reliée à celle-ci par un tunnel.