Quatrième de couverture :
Ce soir-là, dans une petite ville de l’Indiana où tous se connaissent, Katie Mackey, neuf ans, est partie rendre ses livres à la bibliothèque. Elle n’en est jamais revenue. On n’a retrouvé que son vélo.
Trente ans plus tard, quatre voix s’élèvent pour raconter. Tous se confessent, car tous ont quelque chose à se reprocher. Gilley, le frère de Katie ; Raymond R., ‘homme qui a été fortement soupçonné du kidnapping ; Clare, sa femme, tellement reconnaissante que Raymond l’ait choisie et l’ait empêchée de finir ses jours seule. Et le gentil M. Henry Dees, singulier professeur de mathématiques qui vouait à Katie une adoration trouble.
Une disparition d’enfant, des recherches, des battues, l’identification de suspects probables… Une histoire malheureusement déjà vue. Sauf que nous sommes dans une petite ville imaginaire de l’Indiana, « un des trois états que l’on survole (l’Illinois, l’Indiana et l’Iowa) » comme l’explique l’auteur à la fin du roman. Celui-ci s’est inspiré de la ville où il a passé son enfance et son adolescence pour créer Cet été-là. Une petite ville où tout le monde se connaît, où les différences sociales sont bien marquées par les quartiers de résidence : les plus aisés, dont la famille de Katie Mackey, habitent les Heights tandis que les moins favorisés habitent Gooseneck, non loin de la verrerie dirigée par le père de Katie. C’est dans ce quartier pauvre que vivent Clare et Raymond R. Wright (une veuve qui s’est remariée avec un homme plus jeune qui l’a facilement séduite dans sa solitude) et Henry Dees, professeur de mathématique qui donne des leçons particulières durant l’été. Raymond, Clare, Henry Dees et Gilley, le frère aîné de Katie, voilà les quatre points de vue par lesquels nous découvrons, trente ans plus tard, l’histoire de l’enlèvement de Katie.
Dans ce roman polyphonique, tous les personnages qui gravitent autour de Katie portent une souffrance cachée, une solitude profonde, un désespérant besoin d’être aimé. Au coeur de cet été étouffant, les événements vont s’enchaîner, dont ils seront responsables à des degrés divers. Chacun aura quelque chose à se reprocher dans cette tragédie mais les personnages ne sont pas manichéens : ils sont à plaindre de par leur histoire personnelle mais ils sont détestables aussi par leur naïveté mal placée ou par leur arrogance. Les pages se tournent toutes seules tandis que l’on avance vers l’épilogue du drame auquel on ne peut qu’assister impuissant.
« Nous n’étions qu’une minuscule ville de l’Indiana, dans la grand plaine au-delà des collines ondoyantes de la forêt Hoosier – une ville qui abritait une verrerie, proche de la White River qui serpentait vers le sud-ouest avant de se jeter dans la Wabash et de s’écouler jusqu’à la rivière Ohio. Ce jour-là, un mercredi, la température avait atteint les trente-quatre degrés, et l’humidité qui s’était installée avait assommé tout le monde. L’air était chargé de l’odeur des fumées des fours de la verrerie, de la puanteur de poisson mort de la rivière, des sons de la vie de tous les jours : glaçons qui s’entrechoquaient dans les verres, pots d’échappement qui produisaient un bruit de ferraille, portes-écrans qui grinçaient, mères qui appelaient leurs enfants pour rentrer à la maison. »
« Vous devez savoir combien l’été peut être merveilleux dans cette partie de l ‘ Indiana. Du moins, le début de l’été, avant qu’il ne commence à faire trop chaud et que l’ai devienne lourd. Des colins s’appellent dans les prairies, et les tourterelles tristes roucoulent. Les fleurs de chicorée forment des taches bleues au bord des routes, et les rudbeckias à trois lobes revêtent leurs soleils jaunes . Les monarques viennent se nourrir sur le laiteron, et les colibris volètent au dessus des clochettes rouge orangé des trompettes de Virginie. C’est assez , disait ma mère, pour vous faire chanter à vos fourneaux. »
« Peut-être croyez-vous déjà connaître la fin. Peut-être avez-vous décidé qui est bon et qui est mauvais. Mais si c’est le cas – si vous êtes ce genre de personne – , que Dieu vous aide. Demandez à quiconque s’est trouvé au cœur de cette affaire et il vous dira : ça n’avait rien à voir avec le bien et le mal, il ne s’agissait que d’amour. »
« Quand une personne qu’on aime disparaît, c’est comme si la lumière faiblissait, et on se retrouve dans la pénombre. On essaie de faire ce que nous disent les autres : mettre un pied devant l’autre ; relever la tête ; s’abandonner aux secondes, aux minutes et aux heures. Mais il y a toujours cette petite lumière – cette vie qu’on vivait auparavant. Elle est un peu estompée et embrumée, comme un croissant de lune par une nuit d’hiver, quand l’air est plein de glace et de nuages, mais elle est tout de même présente, flottant juste au-dessus de notre tête. On pense qu’elle n’est pas loin. On pense qu’à n’importe quel moment on pourra l’attraper. »
Lee MARTIN, Cet été-là, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Fabrice Pointeau, 10/18, 2018 (Sonatine éditions, 2017)
Petit Bac 2022 – Ponctuation 3