Né le même jour que ma tendre maman, mais deux ans avant, il a lui aussi comme maman, une enseignante. Ce qui l'expose au théâtre très tôt. Suivant des cours de diction, il y fera la rencontre de futurs comédiens Québécois. Parmi eux, un jeune écrivain de 4 ans son ainé, Michel Tremblay. André sera d'abord engagé comme comédien dans une troupe de théâtre naissante nommée Les Saltimbanques. Animé par la scène, il y signera sa première mise en scène, Messe Noire, en 1965. Un collage de textes d'Allan Poe, Jean Ray ou Lovecraft, Brassard y glisse aussi des textes de Tremblay. À seulement 20 ans, il signe une importante production théâtrale d'Euripide, puis, Les Bonnes de Jean Genet, qui sera un des auteurs fétiches. Il se joint à un ami des Saltimbanques, Rodrig Mathieu et à un autre des Apprentis-Sorciers, Jean-Pierre Saulnier afin de co-fonder Le Théâtre d'Aujourd'hui.
À 22 ans, il assure la mise-en-scène des Belles Soeurs de Michel Tremblay au Théâtre du Rideau Vert. La pièce fait un véritable tabac. C'est un immense succès populaire, mais aussi une controverse. On doit constamment s'expliquer sur l'utilisation du joual dans la bouche des comédiennes et des comédiens. Après Gratien Gelinas et Marcel Dubé, les projecteurs se pointent sur André Brassard comme la nouvelle coqueluche des pièces de théâtre montréalaises. À 24 ans, il inaugurera Le Centre National des Arts d'Ottawa en présentant une adaptation de Lysistrata, d'Aristophane, signée de la main de Michel Tremblay. Les deux seront d'une importance capitale l'un pour l'autre. Deux géants talents se nourrissant l'un et l'autre toute leur carrière. Le Marquis Qui Perdit, de Réjean Ducharme, est effectivement, une rare défaite. Ça ne fonctionne pas bien. Mais avec À Toi Pour Toujours, Ta Marie-Lou et Hosanna, toutes deux signées Tremblay, il fait encore sensation.
Il signe aussi des mise-en-scène d'oeuvres de Marivaux (La Fausse Suivante) et de Racine (Andromaque) ou encore amuse avec Feydeau (Le Dindon)
Interressé par le cinéma, toujours en collaboration avec Tremblay, il tournera un court-métrage (expérimental) et deux longs métrages. Le premier de ses longs métrages est un croisement du matériel des oeuvres des Belles Soeurs et d'Hosanna, adapté en film. Le film sera présenté au Festival de Cannes de 1974, rien de moins. Le second, trois ans plus tard sera un scénario original signé Tremblay mettant en vedette Rita lafontaine, Denise Filiatrault, Yvon Deschamps, Huguette Oligny, Paule Baillargeon et Jean Mathieu. Beau Dommage y signe la trame sonore et un membre de ma famille y participe, Normand Chouinard.

Nommé directeur artistique du Théâtre Français du Centre National des Arts d'Ottawa, de 1983 à 1989, il monte, entre autre chose, Britannicus, en 1982, qui fait controverse. En 1983, il est metteur en scène d'un autre jeune auteur, Michel-Marc Bouchard, dont il signe la mise-en-scène de l'une des ses premières oeuvres, La Contre-Nature de ChrysippeTanguay, Écologiste et montera Les Feluettes. Un grand succès. (Qui sera aussi adapté en film, au Canada anglais. Et alors récompensé, mais pas fait par Brassard). Il reprend Les Belles Soeurs en 1984, puis, présente Albertine, En Cinq Temps et Le Vrai Monde? en 1985. Il monte ensuite une ambitieuse adaptation des Paravents de Jean Genet, mal reçue à Ottawa, mais très bien reçue chez nous. Deux solitudes, toujours.


Entre 1991 et 2000, il est directeur artistique de l'École Nationale de Théâtre du Canada. Mais en 1999, il est victime d'un accident vasculaire cérébral qui l'affaiblira jusqu'à la fin de ses jours. Il dirigera quand même les pièces de Tremblay L'État des Lieux et Le Passé Antérieur. Il doit aussi mettre en scène Bonbons Assortis, en 2006, mais se brouille avec Michel Tremblay pour toujours quand on lui retire la tâche.

En 2010, Guillaume Corbeil signe une biographie du grand André Brassard.
Qui a tiré sa révérence mardi dernier, à 76 ans.
Après avoir tatoué le Québec de son talent.
Tremblay dira encore qu'il s'agit de l'Homme le plus important de sa vie.
Et vice-versa.
