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Jean Malonga, premier écrivain congolais

Par Liss

En ce début de l'année 2023, le nom de Jean Malonga s'impose naturellement à notre esprit. En effet, son roman Cœur d'Aryenne fut publié en 1953, roman qui marque la naissance de la littérature congolaise, du côté de la rive droite du fleuve. Ainsi, l'année 2023 est une année de célébration. Nous profitons de cette occasion pour souligner la noblesse du projet littéraire de Jean Malonga qui, pour sa toute première publication, fait des choix dont la valeur est hautement symbolique. C'est, en réalité, un double projet que l'auteur met en œuvre dans son Cœur d'Aryenne.

Il y a tout d'abord la volonté de briser les préjugés raciaux, en imaginant cette union entre le Congolais Mambéké et la Française Solange, malgré les multiples barrières qui se dressent devant eux et que le père de Solange, Roch Morax, incarne plus que tout. Il y a aussi la volonté de donner une autre image des Congolais, qui seraient de fieffés tribalistes. Que lui, Jean Malonga, un ressortissant du Sud, choisisse un héros ressortissant du Nord et qu'il mette en valeur non seulement une langue - le likouba - mais aussi une région - Mossaka et ses alentours - bien opposée à la sienne est un fait particulièrement significatif. Il a même une valeur politique.

Les écrivains se servent de leur plume pour exprimer leurs convictions, traduire leur vision de l'avenir de l'humanité. Jean Malonga croit en l'homme, en sa capacité à faire un pas en avant pour que les générations suivantes vivent sous un ciel plus clément. C'est ainsi qu'il faut comprendre le dénouement du roman qui, malgré la tragédie par laquelle il se termine, est porteur d'espoir. Mambéké et Solange ne peuvent vivre librement leur amour, cependant leur enfant survit.

Jean Malonga, premier écrivain congolais

Le roman commence par une scène de sauvetage, un scénario souvent exploité en littérature. Le jeune Mambéké, 10 ans, sauve la fille des maîtres d'une mort certaine. Emportée par les flots impétueux du fleuve, elle serait morte noyée ou aurait fini dans la gueule du saurien qui la menaçait, si le courageux garçon ne s'était jeté à l'eau pour la secourir. Il ne reçoit pour remerciement de son geste que mépris de la part du père de la petite Solange, un colon qui se comporte en Seigneur sur ces terres congolaises où il fait fortune, où surtout il donne libre cours à une lubricité contre laquelle son épouse ne peut rien. Les mulâtres qui naissent à Mossaka sont les preuves vivantes de ses assiduités auprès de toutes celles qui lui plaisent et qu'il doit posséder, de gré ou de force. Ce sauvetage est le début d'une belle amitié entre les deux enfants, qui n'ont cure des interdictions et des préjugés, amitié qui se mue en amour lorsque les jeunes gens se retrouvent plus tard, devenus adultes, après avoir été tenus éloignés l'un de l'autre, pour mettre un terme à leur fréquentation.

Ce roman met en scène non seulement l'exploitation coloniale, mais aussi l'hypocrisie religieuse qui a présidé à la colonisation. C'est également une ode à l'amour, un hommage à la résistance des autochtones contre les abus du pouvoir colonial, comme l'incarne Omboko, la petite sœur de Mambéké. Elle aurait pu être complètement brisée par ce qu'elle a vécu, mais elle tient ferme et redonne même à son frère le courage de relever la tête.

Cœur d'Aryenne, un roman que je vous invite à découvrir ou à redécouvrir en cette année 2023.

Lire mon premier article sur ce roman en cliquant sur le lien ci-contre : article Coeur d'Aryenne.

Liss Kihindou

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