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Naufrages d’Akira Yoshimura

Par Etcetera
Naufrages d’Akira YoshimuraCouverture chez Babel

Dans le cadre de mon Mois Japonais de février, j’ai lu ce roman qui faisait partie de ma pile à lire depuis quelques temps et dont la très belle photo de couverture m’attirait tout particulièrement, avec cette gracieuse jonque dans une douce lumière rose – une douceur qui ne reflète pas exactement le contenu du livre.

Note Pratique sur le livre

Éditeur : Actes Sud (Babel)
Année de publication au Japon : 1982
Année de publication en France : 1999
Traduit du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle
Nombre de pages : 189

Note sur l’auteur

Akira Yoshimura (1927-2006) a laissé une œuvre considérable qui a marqué la littérature japonaise contemporaine. Ses ouvrages traduits en français sont publiés aux éditions Actes Sud. (Source : éditeur)

Quatrieme de Couverture

Isaku n’a que neuf ans lorsque son père part se louer dans un bourg lointain. Devenu chef de famille, le jeune garçon participe alors à l’étrange coutume qui permet à ce petit village isolé entre mer et montagne de survivre à la famine : les nuits de tempête, les habitants allument de grands feux sur la plage, attendant que des navires en difficulté, trompés par la lumière fallacieuse, viennent s’éventrer sur les récifs, offrant à la communauté leurs précieuses cargaisons.
Sombre et cruel, ce conte philosophique épouse avec mélancolie le rythme, les odeurs et les couleurs des saisons au fil desquelles Isaku découvre le destin violent échu à ses semblables dans cette contrée reculée d’un Japon primitif.

Mon avis

Les rythmes de la nature et les activités des hommes liées aux saisons sont très présents dans ce roman et en constituent la toile de fond permanente. Ainsi, sur les quatre années décrites ici, nous voyons périodiquement se répéter les mêmes gestes pour la survie et la subsistance : pêche aux poulpes, aux maquereaux, aux encornets, mais aussi retour régulier de certains rituels religieux et cérémonies et nous sommes pris dans ces cycles routiniers d’une existence pauvre en espérance et dont les perspectives d’amélioration sont quasi inexistantes. Certes, d’année en année il ne se passe pas toujours la même chose et la saison de la pêche peut s’avérer excellente ou exécrable, avec les conséquences inévitables qui en découlent.
Dans cette vie dure et monotone, où menacent les catastrophes diverses, le seul petit espoir d’une vie meilleure est de pouvoir provoquer le naufrage d’un navire, un soir de tempête hivernale, et de s’emparer de sa cargaison. Et encore, ce méfait peut attirer sur les villageois de très violentes représailles s’ils sont découverts par les autorités ou par les propriétaires du navire échoué. Et le naufrage qui peut les sortir de la misère peut aussi, par contrecoup, les enfoncer dans un destin encore plus sinistre que celui auquel ils veulent échapper.
L’auteur développe une vision de la vie pour le moins pessimiste et sombre mais son écriture est assez envoûtante, avec la présence de certains symboles comme la couleur rouge annonciatrice de souffrance et de mort, de très belles descriptions de paysages tandis que la psychologie des personnages est réduite au minimum et s’exprime surtout par des actions utilitaires et très peu de mots.
Un beau roman dont l’atmosphère mystérieuse, un peu étrange et menaçante, et le rythme lancinant et insistant, me marqueront sans aucun doute pour longtemps !

Un Extrait page 72

À la pêche, Isaku s’interrompait de plus en plus souvent pour lever les yeux vers les lointains sommets de la montagne. La pêche au poulpe était la dernière de l’année, et dès le début de l’hiver reviendrait la saison des bateaux. Il espérait leur venue, source de richesses pour le village. L’atmosphère lourde qui régnait depuis la mauvaise campagne de pêche au poulpe deviendrait alors beaucoup plus joyeuse.
Un matin, il était en mer lorsqu’il se rendit compte qu’une légère modification de couleur s’était produite sur le sommet le plus élevé dans le lointain. Le rougeoiement des feuilles n’allait pas tarder à commencer.
Le soir en rentrant chez lui, Isaku dit à sa mère :
– On dirait que la montagne commence à rougeoyer.
Sa mère, qui était en train de fendre du bois, garda le silence et ne releva même pas la tête. Il ne sut pas si elle s’en était aperçue ou si elle n’avait pas déjà à moitié renoncé à tout espoir de visite des bateaux pendant l’hiver.
Une dizaine de jours plus tard, les sommets étaient franchement rouges et, la couleur devenant plus foncée, elle commença à s’étendre aux sommets voisins. Dans le ciel pur apparurent des nuages moutonnés et la mer devint plus froide. (…)


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