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Taxi volant

Par Tobie @tobie_nathan

Voyage dans le ventre de la mère

Tobie Nathan 

Taxi volant

Ce véhicule devrait être mis en service lors des jeux Olympiques de 2024. Il promet de nous faire planer au-dessus des grandes métropoles dans un confort absolu. Comme l’enfant flottant dans le liquide amniotique ?

Dans le ventre de ma mère, flottant dans le liquide amniotique, j’étais transporté, tout choc amorti, dans un confort absolu… Cette période s’est inscrite à jamais dans mes neurones les plus archaïques comme modèle du transport idéal, parfait. Parce qu’après ce portage idyllique, il y eut un cataclysme, une expulsion de la capsule originelle, avant d’être livré sans défense aux violences de la gravité. Tout commença, je m’en souviens, par une petite claque sur les fesses.

Taxi volantPhilosophie Magazine n°166 janvier 2023

Des récits extraordinaires ont entretenu mon illusion d’y revenir, de me débarrasser un jour des contraintes de la pesanteur…Comme celui de saint Thomas d’Aquin s’élevant dans les airs en contemplant la statue du Christ, ou celui de saint Dominique voletant comme un ballon dans un monastère à Castres… Mais ceux-là, comme tant d’autres religieux en lévitation, étaient animés d’une foi intense que je ne possède malheureusement pas. J’ai lu qu’au Moyen Âge en Occident, les sorcières se déplaçaient dans les airs en chevauchant un balai magique, qu’en Afrique, les sorciers traversaient la nuit en y laissant de petites traces de lumière rouge et qu’en Orient, les mages circulaient à hauteur des nuages sur des tapis volants. Mais ceux-là cultivaient des pouvoirs occultes, bien trop longs à acquérir. Nous autres, pauvres quidams, il ne nous reste que les taxis pour décoller du sol.

Chaises à porteurs, dans l’Égypte antique, en Perse, à Rome et jusqu’au XVIIe siècle en Europe, qui secouaient dans tous les sens, fiacres, tirés par un ou deux chevaux qui maculaient la chaussée et empuantissaient l’atmosphère, voitures-taxis qui ont envahi les villes jusqu’à les étouffer… Sans parler des motos-taxis, du zémidjan (« prends-moi vite ! ») béninois au bendskin (« penche-toi pour mieux t’accrocher ») camerounais, en passant par le boda-boda kényan (« border to border »)… Mais là, franchement, il faut s’agripper !

Et voilà que vient de naître un nouveau concept de transport, le taxi volant. Il s’agit d’une sorte de très gros drone s’élevant dans les airs à l’aide de dix-huit hélices et volant à près de 100 km/h à une altitude de 300 m… On s’y déplacera, confortablement installé, ignorant les embouteillages et admirant les monuments des villes et les paysages des campagnes. Les premiers modèles seront déployés à l’occasion des jeux Olympiques de 2024 à Paris, reliant en une quinzaine de minutes l’aéroport de Roissy au centre de la capitale. Tout le monde s’y est mis – Airbus, Safran, Dassault, Thales, Volocopter… Et le prototype, parfaitement abouti, a décollé de Pontoise le 10 novembre dernier.

C’est sans doute le transport qui se rapproche le plus du ventre de ma mère lorsqu’elle me portait, et ce jusqu’à la forme de la cabine, évidemment ovoïde. Il paraît que d’ici à 2035, il en circulera 60 000. Déjà se posent des problèmes insolubles. Saura-t-on organiser les couloirs, les routes aériennes ? Et tout cela au-dessus des grandes villes, dès lors couvertes du bourdonnement continu de dizaines de milliers de moteurs électriques. On aura l’impression d’être enfermé dans le ventre… d’un aspirateur. Quant au prix de la course, ne sera-t-il pas aussi élevé qu’une balade en chaise à porteurs dans l’Antiquité ?

À tout prendre, finalement, je préfère le tapis volant.

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