Dans la tradition du récit d’apprentissage professionnel et intime, Sage-Homme suit l’évolution de Léopold, un jeune étudiant en médecine qui, ayant raté sa première année, se trouve contraint d’accepter une formation de sage-femme…
Comme il ne cesse de l’affirmer, cette parenthèse professionnelle est temporaire, et il ne pense qu’à réintégrer de vraies études pour être médecin. Mais ce qui est au départ un échec va s'avérer in fine une révélation, de quoi donner de l'espoir aux étudiants sur leurs choix d'orientation.
Douze ans après son dernier long métrage en date, Et soudain tout le monde me manque (et son impressionnant casting : Mélanie Laurent, Michel Blanc, Géraldine Nakache…), Jennifer Devoldère fait son grand retour au 7eme art en s’emparant d’un sujet actuel sur le monde de l’hôpital pour l’emmener sur le terrain de la chronique sociale féministe, qui trouve un bel équilibre entre rires et émotions.
Sous les oripeaux plutot classique du récit iniatique, dans un rythme qui ne faiblit jamais. la réalisatrice opére en douceur une forme de déconstruction de la virilité à la fois introspective – puisqu’elle va transformer, le rapport de Léopold à sa masculinité – et sociale, puisqu’elle opère une véritable remise en cause du système hospitalier.
Au-delà de ce récit d'apprentissage par ailleurs très plaisant à suivre malgré certains passages obligés ( le premier amour, la volonté de tout laisser tomber, les premieres joies, ce que réussit subtilement Jennifer Devoldère – comme en témoigne son titre ironique – dans Sage-Homme c'est l'évocation fine et pertinent du regard que pose l’homme sur le corps de la femme, que ce soit lorsque Leopold apprend à évaluer l’ouverture du col utérin, ou lorsque Nathalie lui apprend sur mannequin à caresser sa future petite copine pour devenir un bel amant.
La cinéaste évoque également les dysfonctionnements du système médical où les démarches administratives seraient bien capables de laisser mourir les patients ou bien encore l’héroïsme d’une profession méprisée par les médecins eux-mêmes.
Jennifer Devoldere partage habilement son récit entre la critique et l’optimisme : c’est un regard qui croit, entre l’émotion et l’humour.
Karin Viard incarne le mieux l’esprit du film, grande gueule au grand coeur à la fois libre, rageuse, désopilante, bouleversante et son duo avec le formidable Melvin Boomer, qui épatait en Joey Starr dans le Monde de demain au charisme indéniable, finit d' emporter le film dans son énergie et son intensité.
Sage-homme ***
De Jennifer Devoldère, avec Melvin Boomer, Karin Viard, Tracy Gotoas, Steve Tientcheu. 1 h 45.
Sortie mercredi 15 mars 2023.
On avait rencontré Jennifer Devoldère et Melvin Boomer,en décembre dernier lors de la toute première nationale de Sage Homme lors de la seconde édition du festival du film de société de Royan.