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« In England, no one can hear you scream… »
Depuis le temps que j’entends parler ou lis le nom de Sleaford Mods, ou que je vois leurs visages : enfin, je pose mes oreilles, attentivement, sur leur univers – comme je m’y attendais – pour le moins singulier. Comme ce fut le cas en leurs temps pour The Jam, The Clash ou Public Enemy, des noms parfois utilisés comme référence. Un univers singulier donc, grâce à une touche unique de ce duo anglais vraisemblablement inimitable. Mon seul point de comparaison quant à la candeur et l’apparente difficile personnalité de leur œuvre serait un autre Anglais, le cultissime Tricky – pour la façon totalement désabusée de rapper-chanter-scander et la musique sans concession faite d’un on-ne-sait-quoi de brute mais jamais brutale et toujours incroyablement rythmée, ambiancée. Mais la ressemblance, s’il y en a une, s’arrête là. J’aurais aussi pu choisir un nom entre The Streets et Slowthai, et d’autres encore. Mais vous avez compris que Sleaford Mods fait en réalité du Sleaford Mods.
Loin du trip-hop, il est pourtant difficile de savoir où classer le duo. Rap ? Rock ? Électro ? Avec un esprit résolument punk en plus. Une nouvelle fois, on voit bien la limite des étiquettes. Côté apparitions, notons celles de Perry Farrell et Dave Navarro (tous deux de Jane’s Addiction) sur « So trendy » et de Phil Booth sur la chanson d’ouverture éponyme « UK grim », sans oublier Florence Shaw (de Dry Cleaning) sur « Force 10 from Navarone ». Cependant, ce sont bien les deux artistes anglais qui donnent tout son charme à UK Grim. Andrew Fearn développe une musique qui s’appuye essentiellement sur le duo basse-batterie, agrémenté évidemment de toute une palette d’autres éléments venant nous faire passer dans nombre d’univers différents mais si proches à la fois. Quant à Jason Williamson, il scande ses paroles tellement personnelles tout en sortant de lui-même pour nous conter ce petit quotidien qui l’entoure, lui, Andrew et tout le peuple britannique.
Plus que jamais avant, je dois bien avouer que UK Grim est une véritable claque, une gifle dont on ressent le souffle d’air de façon violente mêlée d’un grand ouf de soulagement tant on est passés près d’une douleur certaine. La crainte n’en demeure pas moins réelle, sous nos yeux, car nous voici averti par les sonneurs d’alarme Sleaford Mods – un duo qui ne pouvait résolument pas venir d’ailleurs que d’Outre-Manche.
(in Heepro Music, le 17/03/2023)
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