Musique d'antan: le soldat désaccordé de Gilles Marchand

Ce roman est depuis quelque temps dans ma pal mais parfois, on sait que ce n'est pas le bon moment pour le lire, comme l'année a été quelque peu chaotique. J'ai attendu et j'ai bien fait.

J'ai trouvé le style de Gilles Marchand plus épuré, qui synthétise encore davantage son réalisme, sa poésie en retrouvant, son côté dénonciation de l' absurdité de la guerre, son engagement. J'ai vraiment trouvé et retrouvé les sensations que j avais eues avec une bouche sans personne. La folie des hommes, de la violence et pourtant la fraternité qui existe, l'amitié avec Davisse et cet amour fou entre Joplain et Lucie.J'ai aimé les moustaches, les références aux autres romans , les allusions littéraires et aux écrivains qui ont écrit sur la guerre, cet écho littéraire. J'avais peur d'être déçue, car je suis toujours chatouilleuse sur la période de la 1re guerre et les soldats ;c'est mon sujet de mémoire de  maitrise d'histoire sur les soldats instituteurs et l'embrigadement de l'école primaire pendant la guerre . J'en ai lu des lettres de mobilisés dont le dossier se terminait par mort pour la France et qui avait à l' époque le même âge que moi parfois, j'en ai compulsé des ouvrages sur Verdun, la brutalisation des sociétés, sur la vie dans les tranchées. Le contexte d'attente d'après-guerre, les scènes de la guerre, de la vie quotidienne sont très bien décrits. J'ai eu l'impression de vraiment rebasculer à cette époque et d'être dans cette quête du narrateur, sa volonté de trouver de l'espoir, du beau, de rendre justice.

L'amour vibrant, cette histoire qui essaye de survivre à ce massacre, aux préjugés de classe, aux obstacles de la vie, coûte que coûte est très émouvant. Ces personnages cabossés qui sont pourtant magnifiques, pas des héros, juste des hommes qui tiennent comme ils peuvent. Une fois de plus avec ses personnages parfois atypiques comme l'archiviste et son obsession des chiffres , ses poilus qui chacun vivent avec leurs ombres, leurs fantômes. Dans une plume à la fois poétique et réaliste, l'auteur poursuit son engagement et apporte une pierre de plus à son édifice de mots, d'histoire. Ce récit  fil rouge  de la Fille de la Lune, de la beauté sur le champ de bataille, est-elle une métaphore de la vie?  Un conte, une légende,  a-t-elle une explication terre à terre à vous de voir en lisant le roman . J'ai apprécié le caractère obsessionnel du personnage, son engagement, sa mélancolie. 

Je voulais le lire sans la folie de la rentrée littéraire ( bon au final ça aura été celle des prix sans le vouloir lol). Mais il m’a donné à voir autrement la guerre avec ce réalisme magique et m a touché, il m'a rappelé ma colère face à la propagande et à l'énorme sacrifice de ces hommes.