Une voix, un engagement, un parcours d’actrice d’une exigence folle
Née au Liban, ayant fait ses classes dans le théâtre de la décentralisation puis à l’Actors Studio de New York, Delphine Seyrig (1932-1990) se révèle au cinéma, à l’orée des années 1960, dans L’Année dernière à Marienbad d’Alain Resnais.
Elle enchaîne ensuite avec les plus grands auteurs de l’époque, de François Truffaut à Jacques Demy, qui en fait une inoubliable fée des Lilas dans Peau d’âne. Le hasard des rencontres et la singularité de sa personnalité l’entraînent vers un cinéma de recherche, comme l’illustrent son compagnonnage avec Marguerite Duras, puis le rôle inoubliable de Jeanne Dielman, pour Chantal Akerman en 1975.
Dans cet essai littéraire en forme d’exercice d’admiration, qui commence par une scène étonnante, où l'on retrouve Seyrig chez elle, recevant le magazine "30 millions d’amis" et manipulant de la nourriture préparée pour ses chats, Virginie Apiou met en lumière les multiples facettes de l’une des actrices les plus fascinantes du cinéma français
Elle tente, à travers l’évocation de sa filmographie, de sa vie et de son combat féministe, de cerner le “mystère Seyrig”.

Virginie Apiou dessine le portrait de l’énigmatique Delphine Seyrig, et sa voix au magnétisme incroyable, au travers de ses films, de ses pièces de théâtre ou de ses interviews télévisées.
Rien n’est raconté de façon chronologique, mais le récit s’enchaîne logiquement par rapport aux sentiments, aux attitudes, aux engagements de l’artiste, ou par rapport aux événements de l’époque.
Pas vraiment une biographie classique, "D’après Delphine Seyrig" est plutôt comme le kaléidoscope d’une vie avec toutes ces influences.
C’est une arborescence cinématographique qui revient sur les héroïnes de cinéma qui ont jalonné sa vie, de 1932, année de sa naissance, à 1990, année de sa disparition, mais aussi sur les différentes mythologies incarnées par la comédienne.
On y croise brièvement Demy, Kerouac, Sammy Frey, Lee Strasberg et bien souvent Michael Lonsdale. Cela donne forcément envie de revoir «L’année dernière à Marienbad», «Jeanne Dielman», "Peau d'ane"«Baisers volés», ou encore un film plus confidentiel comme «Les lèvres rouges»- voir notre chronique ici même-
Ce bref mais captivant essai montre une Virginie Apiou fascinée par Delphine Seyrig. Mais en même temps, comment blamer l'autrice car qui ne serait pas fasciné par cette femme au destin hors du commun ?

Virginie Apiou, «D’après Delphine Seyrig», Actes Sud, 124 p.