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Profil-type, carences alimentaires et autres poncifs au sujet des végétariens

Par Cicerolle

C’est incroyable ce qu’on peut lire dans la presse à propos des végétariens. Des tas d'idées reçues, de propos réducteurs, à croire que ces gens-là sont une race à part, porteuse d’une maladie mystérieuse et qu’on regarde de loin (et de travers) pour ne pas risquer d’être contaminés. D’où cette vision cucul la praline. Il paraîtrait que les végés ne fument pas, ne boivent pas, font du sport… Sans blague ? On les a tous rencontrés, pour affirmer cela ? C’est comme si on disait que les amateurs de viande et poisson mangent du bœuf le lundi, du poulet le mardi, du cabillaud le mercredi, du thon le jeudi... Je les entends déjà qui rouspètent, à juste raison ! Personnellement, je ne fume pas, mais je ne crache pas sur un verre de vin à l’occasion et je ne fais aucun sport, ma seule activité physique étant un peu de marche à pied, lorsque la météo le permet. Il y a autant de façons de vivre en étant végé qu’il y a de régions, de métiers, de tranches d’âge et de traits de caractères !

Mais on retrouve ces poncifs dans tout une série d’articles, copie les uns des autres, par exemple, ici. Il est dit que les végétariens souffrent moins d’obésité, de diabète, de cancer, sont moins malades. Mais qu’un régime carné accompagné d’une bonne hygiène de vie donne les mêmes résultats. Quelle hypocrisie, quand on sait qu’une alimentation végé bien pensée est nettement moins grasse et contient beaucoup moins de cholestérol, voire pas du tout !

On cherche aussi, dans ces articles, à établir le profil type du végétarien. C’est bien franchouillard, cette manie de vouloir à tout prix établir des classifications. Dans d’autres pays où le végétarisme est plus courant et presque banal (les pays anglo-saxons en particulier), personne ne se soucie de ce genre de choses. Les gens vivent ensemble sans se poser tant de questions et ce choix est aussi commun que le fait de préférer le rouge au bleu. Mais ce qui là-bas est tout à fait naturel passe encore ici pour une bizarrerie. Au nom de quoi, je vous le demande ?

Il n’y a pas, il n’y aura jamais de profil-type du végé. Les motivations sont extrêmement diverses et personnelles, allant de la protection animale (qui n’est jamais mise en avant dans les articles de presse consacrés aux végés. Trop polémique, peut-être ?), à des questions de santé, d’allergies, voire d’écologie, en passant par les soucis de budget, l’envie d’authenticité, ou, tout simplement, comme pour moi, un manque d’attirance pour la viande. Ou bien, comme l’écrit cet article dans les Echos :  «c’est souvent un acte protestataire contre la malbouffe, l’alimentation industrielle, voire la gastronomie bourgeoise». Ce dernier point tombe pile dans mon crédo. Protestons, mes amis, protestons, les bonnes raisons ne manquent pas ! Mais je ne pense pas que ce soit représentatif de la majorité des végés. Beaucoup ne se reconnaîtront pas là-dedans.

Il n’y a pas non plus d’alimentation végétarienne type. Sinon vous trouveriez sur ce blog des plats à base de seitan, de quinoa, d’algues et autres graines germées qui ne sont pas ma tasse de thé mais dont certains végés (ou pas !) sont fans. Quant à l’équilibre alimentaire du végétarien, il est, comme pour les omnivores, soumis à une bonne information et à des menus bien conçus. La révolte gronde en moi quand je lis que les végétariens ont un risque de carences en fer, en calcium, en iode, que manger trop de graines, de noix et d’huiles n’est pas bon pour la santé et que sais-je encore… Non mais sans blague ! De très nombreux omnivores sont eux-mêmes carencés en fer et en d’autres choses. Beaucoup d’entre eux mangent peu de viande, jamais de légumineuses, ce qui était mon cas il y a encore un an.

Or, avec les légumes et fruits secs, et les céréales complètes, le taux de fer des végétariens est certainement bien plus équilibré que celui de bon nombre de non-végés qui mangent n’importe comment (et ils sont légion). A ce sujet, je vous propose d’aller lire le post que nous avons fait sur le forum "Veg et bio" indiquant les sources de fer végétales, avec doses et quantités précises, informations données sur un autre forum, par une professionnelle de la nutrition. Voyez que je ne parle pas en l’air. Vous verrez qu’il est facile d’obtenir chaque jour sa dose de fer végétal, sans se prendre la tête avec cela, sachant qu’il faut 15 mg/jour pour une femme, 8 mg pour un homme (adultes). Pour ma part, depuis que j’ai adopté cette alimentation, je ne connais plus ces coups de fatigue si fréquents par le passé.

Au sujet du calcium, plusieurs eaux minérales en contiennent suffisamment pour couvrir une bonne partie des besoins quotidiens qui sont, pour un adulte, de 900 mg/jour. J’ai adopté l’eau Courmayeur : 800 mg par bouteille, excusez du peu.  Vittel et Hépar en contiennent également, à un taux moindre. Les fruits et légumes, les fruits secs, les légumineuses en apportent aussi. Il n’y a pas que les produits laitiers qui fournissent du calcium. Sinon, imaginez la détresse des nombreux intolérants au lactose.

L’iode ? Il y en a dans tous les sels fins vendus en magasin, à des doses calculées pour couvrir les besoins ! Tout le monde sait cela, enfin ! Pour ma part, vivant en bord d’océan, je dois avoir davantage d’iode en stock que tous les parisiens qui mangent du poisson mais partent en vacances une fois par an seulement ! Voyez, il est trop facile de dire que les végés manquent d’iode !

Quant au fait qu’il est dangereux de manger trop de graines… bien sûr ! De la même façon qu’il n’est pas bon d’aller trop souvent au Mc Do ! De manger trop de pizzas surgelées et autres plats tout faits si prisés par bon nombres de gens n’aimant ni cuisiner, ni manger des légumes ! Mais qui a dit que les végétariens passaient leur temps à manger des graines ? Vous avez déjà vu, vous, sur un blog végé, un maxi-gratin de noix et de graines de tournesol ? Assez de stigmatisation, enfin !

Aussi, mesdames et messieurs les journalistes, revoyez votre copie. Au lieu de reprendre en choeur, sans discernement, le même communiqué de presse mal ficelé au sujet de l’alimentation végé, informez-vous réellement sur ce qu’est le végétarisme, soyez enfin honnêtes et cessez de nous considérer comme des bestioles étranges et farfelues.

Certes, nous ne mangeons ni viande, ni poisson (trop de gens pensent que les végés mangent du poisson), mais à part ça, nous sommes comme vous, nous avons deux bras, deux jambes, deux yeux et deux narines, nous vivons comme vous, parmi vous et nous pestons tout pareil que vous dans les embouteillages. (ça vous étonne, hein ? Vous imaginiez que nous nous défoulions en avalant double dose de tofu au repas suivant ?)

Nous avons de bonnes raisons d’être fiers de notre façon de manger, et de porter haut notre bannière végétale. Nous avons déjà compris, nous, qu’aucun produit animal n’est indispensable à l’équilibre alimentaire ou à la cuisine. Hormis la fameuse vitamine B12, exception confirmant la règle, tous les nutriments et procédés culinaires qui existent au niveau animal, qu’il s’agisse de viande, poisson, œuf ou laitage, salé ou sucré, trouvent leur équivalent dans le monde végétal. Tous.  Il n’y a qu’à voir le succès de l’agar-agar sur nos blogs culinaires, en lieu et place de la gélatine. Mais aussi, sur les blogs végétaliens, les gaufres, flans, lemon curd et autres génoises, sans le moindre gramme d’œuf. Cette cuisine-là a de beaux jours devant elle. Pour les meilleures raisons du monde, qui ne s’arrêtent pas au refus de l’exploitation animale. Etre végé, c’est aussi faire preuve de réalisme et de sagesse, c’est être en prise avec les problèmes écologiques les plus flagrants, proches de nous, concrets, notre vie quotidienne d’aujourd’hui et demain. Pour en être convaincu, il suffit de lire quelques extraits de cet autre article, dans les Echos, traitant, lui, des problèmes liés à l’eau, qui fait froid dans le dos :

«Le monde économique commence à s'intéresser à l'eau. Et ce qu'il découvre n'est guère rassurant. Les organisateurs du Forum économique mondial de Davos (Suisse), (…) ont publié pour la première fois un rapport consacré à cette question ».

Et son ton est alarmiste. "Nous ne pouvons tout simplement pas continuer à gérer l'eau comme nous l'avons fait par le passé, ou la sphère économique s'effondrera", écrivent les auteurs en préambule. Les perspectives des deux prochaines décennies, si rien ne change, donnent la chair de poule. La rareté de l'eau aura des conséquences sur la croissance économique, la sécurité humaine, l'environnement et la stabilité géopolitique."

"Les ressources de plusieurs régions du monde sont au bord de la faillite ».

« Le changement des habitudes alimentaires dans les pays en développement, où la consommation de viande s'accroît, aggrave la situation. Un régime carné requiert 5 400 litres d'eau par jour, soit le double d'un régime végétarien, pointe le rapport. » (etc....)

A bon entendeur…


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