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Coaching gastronomique : un métier à inventer

Par A Bride Abattue @abrideabattue

J'étais invitée ce midi dans ce qui m'avait été annoncé comme une des meilleures tables des Yvelines, un restaurant spécialisé dans les poissons. Frédéric Berqué m'avait tant mis l'eau à la bouche avec sa Cuisine à bâbord (cf. billet de mercredi) que c'était vraiment le type de restaurant dont la carte allait me réjouir.
La déception a été constante tout au long du repas, tant du côté de mon assiette que de celle de mon hôte. Je ne donnerai pas le nom et l'adresse de l'endroit parce que "casser" n'est pas ma philosophie, que les produits étaient de bonne qualité et le service aimable (sans plus néanmoins). Si le prix du menu était divisé par deux j'aurais même pu applaudir gentiment.
Mais je ne vais tout de même pas jeter la serviette sans broncher !
Ayant annoncé que j'écrirais peut-être un billet pour le blog (je ne prends jamais un commerçant, un restaurant ou quiconque en traitre) j'avais eu l'autorisation de photographier chaque plat. En les regardant estomac reposé, je me suis dit qu'il s'en était fallu de peu pour que chaque plat soit une réussite. D'où l'idée d'un relooking un peu particulier sans me prendre pour Gordon Ramsay, parce qu'il suffirait d'un peu d'imagination pour que l'endroit soit parfait. Il l'était d'ailleurs il y a quelques mois.

Coaching gastronomique : un métier à inventer

Coaching gastronomique : un métier à inventer

Commençons par la désormais traditionnelle mise en bouche. On annonce un caviar de hareng, en clair des oeufs de harengs. C'est bon mais servi vraiment chichement. La photo (truquée) de droite est plus appétissante. Le poivre est trop prononcé et il manque un feuilleté pour apprécier la Chantilly.


Coaching gastronomique : un métier à inventer
Coaching gastronomique : un métier à inventer

Une des entrées consistait en un tartare de bar aux légumes croquants. Mais pourquoi donc le présenter dans une telle assiette ? Le conseil : jouer à fond la diversité et annoncer un trio de tartare avec chacun un poisson différent.
Parce que trois portions identiques comme celle-ci n'a pas de sens.
D'accord pour des légumes croquants, mais pas crus, surtout quand il s'agit de poivrons. On pourrait les attendrir par une brève cuisson vapeur. Et puis oser fenouil, artichaut ...

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L'entrée que j'avais choisie était un dos de cabillaud avec une mousse de coco et ananas rôti.
Très belle présentation, même si je reprocherais qu'il y ait encore une Chantilly. L'ananas était fondant à souhait. La mousse légère et parfumée. Le poisson parfaitement cuit mais un peu fade et assez "ridicule", tout juste posé avec sa peau sur l'assiette. Je le verrais plutôt recouvert d'une sorte de croûte épicée.

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Passons au plat principal.
Ce filet de daurade est lui aussi posé sans manière dans l'assiette comme son frère cabillaud l'était précédemment. Le même trait de caramel balsamique souligne le bord de l'assiette. La présence de la salade de roquette est injustifiée et la purée de chou-fleur a ... un goût de chou-fleur.


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On me prévient que les gambas sont décortiquées. Bravo , mais le travail n'est pas terminé et les crustacés sont fermes, très fermes. Le beurre fondu est bienvenu pour les accommoder, mais il ne s'accorde pas avec le risotto aux fèves. D'ailleurs pourquoi servir un tel risotto ? Les fèves ont vraisemblablement été broyées. Si le but était d'obtenir la couleur verte, il y avait d'autres légumes ou herbes aromatiques à privilégier.


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Les desserts seront-ils plus inventifs ?
La Tatin de nectarines est une pâte sablée surmontée de fruits qui ont été passés sous le grill. Elle est donc "façon" Tatin. Et voici encore de la Chantilly. Quant au sorbet de fraises, on n'en comprend encore une fois pas l'intérêt. Les cuisiniers devraient comprendre que juxtaposer n'est pas synonyme d'accorder.

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Le soufflé au chocolat était recouvert d'une généreuse couche de sucre glace que je me suis pris dans les narines en soufflant sur ma cuillerée pour la refroidir.
Le bouquet de menthe était inesthétiquement enfoncé dans la croute mais je reconnais que les deux saveurs s'accordaient.
Par contre la tuile à l'orange était une fausse note et bien trop grasse. Elle n'avait rien à faire sur la cassolette de sorbet cacao. Le sorbet lui-même ne relevait pas le plat. Une glace au lait d'amande aurait eu plus d'intérêt. Ou un sorbet pêche blanche qui n'aurait pas été trahi par la menthe.
Le café était accompagné d'un minuscule blini, d'une verrine de fromage blanc au citron (le nom était plus savant) à boire à la paille, et d'un tout petit financier aux noisettes. L'appareil photo n'a pas été activé pour immortaliser l'instant.
On peut me trouver sévère en voyant les photos, mais ce ne sont que des photos et il ne faut pas oublier que le prix était TRES élevé. Et surtout que l'important n'est pas l'assiette (pour cela elles sont jolies les assiettes !) mais ce qui est dans l'assiette.
Le but est double : faire réfléchir le chef (à qui je vais envoyer le billet) qui dispose à mon avis d'un potentiel pour reconquérir le titre de meilleure table de la région ou qui devra songer à changer ses tarifs. La salle était d'ailleurs clairsemée, ce qui est peut-être un indicateur.
Et puis donner aux lecteurs des idées d'associations à partir de poissons. Enfin il faudrait qu'on soit davantage courageux en osant répondre la vérité au serveur qui demande systématiquement : cela a été messieurs-dames ? en desservant.


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