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Sébastien Gaudard : Pâtissier

Par Gourmets&co
Sébastien Gaudard : Pâtissier

Sébastien Gaudard : Pâtissier par Patrick Faus

patisseries lt 340x225« Je ne revisite pas la pâtisserie, je la fais renaître »
Sébastien Gaudard est un pur produit de la pâtisserie. Il est littéralement né dedans. Le père est un célèbre et influent pâtissier de Lorraine, à Pont à Mousson exactement, dont la notoriété déborde largement les frontières de la région. Dans ces cas de figure, deux attitudes : on « tue » le père en partant au loin faire autre chose ou on se plonge corps et âme pour le suivre et éventuellement plus tard le dépasser. Dans la restauration, les exemples ne manquent pas : Lorrain, Troisgros, Bras, Marcon, etc. Pour sa part, Sébastien n’a pas hésité une seconde. Il aime cette ambiance de travail, ces odeurs, ces saveurs de gâteaux, de viennoiseries, de sucré, de chaleur odorante. Il sera pâtissier.
Apprentissage, formation chez des amis du père (Maison Vergne à Audincourt), et la carrière commence. Petit à petit, il voit pourtant les limites dans le style des maisons où il travaille. Il rêve d’ailleurs, et ailleurs c’est Paris. Il commence par son service militaire où il est pâtissier à Matignon pour deux premiers ministres Pierre Bérégovoy et Edouard Balladur « deux personnalités différentes mais tous les deux gourmets et gourmands ». Après quelques remplacements dans diverses maisons, il rencontre Pierre Hermé qui cherchait un commis. On ne refuse pas le destin… Il entre donc chez Fauchon, devient très vite son deuxième assistant, et premier assistant six mois plus tard. « Il m’a transmis énormément de choses. » Sébastien Gaudard a la chance de se trouver au bon endroit, au bon moment avec la bonne personne. Cela durera trois ans avant que Pierre Hermé ne parte pour d’autres aventures. Sébastien Gaudard le remplace et restera encore cinq ans avant que les changements intervenus dans la mythique maison ne la rendent de plus en plus banale. Il fait du conseil pour des marques puis c’est l’aventure du Délicabar, le snack chic et furieusement féminin du Bon Marché. Succès, notoriété, et aujourd’hui, enfin, sa boutique parisienne depuis novembre 2011.

Une boutique qui lui ressemble en tous points tant à l’extérieur que dans le choix de la décoration intérieure. Une volonté évidente d’adéquation entre son travail, son style et sa pâtisserie. Le décor retrouve les codes des pâtisseries à l’ancienne, marbre, éclairage, agencement et présentation des gâteaux, couleur verte extérieure, comme les pâtisseries traditionnelles qu’il recréé à sa manière sans chercher le copier/coller. Eclair chocolat, tarte citron, millefeuille, Paris-Brest, chou à la crème, les chocolats, bonbons, sucettes, tout un univers de saveurs retrouvées. Gâteaux d’antan, bistrots, plats de ménage, l’époque se retourne sur ses acquis et sur son passé, preuve d’une insécurité latente devant un avenir qui n’attire plus mais inquiète. Nourritures terrestres et rassurantes.

Devant les pâtisseries bien alignées comme à la parade, la tentation est de tout goûter et de tout prendre. Pourquoi pas, mais si l’on doit choisir, et tout choix est un sacrifice, quelques indispensables s’imposent.
- Le Paris-Brest, refait aujourd’hui par les grands pâtissiers alors que seuls les boulangers pâtissiers continuaient à le faire d’une manière… personnelle. Chez Gaudard, il est proche de la perfection : pâte à chou moelleuse, délicate crème au beurre praliné (ou chiboust ?), et amandes craquantes. Goût marqué et texture parfaite.
- Le Mussipontain (du nom des habitants de Pont à Mousson, hommage aux parents..) : un succès à l’amande, crème vanille, amandes caramélisées : on l’avale (presque) d’un coup.
- La Tarte au citron, qui pourrait concourir sans risques pour la meilleure de Paris avec sa douce pâte sablée et sa crème au citron puissante, sans meringue pour éviter le trop sucré.
- L’Eclair au chocolat, toujours avec cette pâte à chou parfaite.
- Le Kougloff, cette délicieuse brioche alsacienne aux raisins secs et au kirsch, encore meilleur légèrement rassis le lendemain, trempé dans le café ou avec un petit verre de Gewurztraminer !
Sébastien Gaudard, ou le plaisir de la gourmandise retrouvée.

Pâtisserie des Martyrs  Sébastien Gaudard Photo Michaël Adelo© 2 228x340
Sébastien Gaudard et Gourmets&Co – Rencontre

Pensez-vous que la pâtisserie s’était un peu trop sophistiquée ces dernières années ?
C’était surtout le cas de la pâtisserie de restaurant gastronomique où l’on choisit pour soi et où on peut aller vers des choses plus extrêmes. Le dessert est également servi à la minute. C’est un avantage conséquent. En boutique, on fait souvent un choix pour plaire au plus grand nombre. De plus, on a le risque du transport et que les gâteaux arrivent jolis à bon port !

Comment expliquez-vous ce retour aux gâteaux « traditionnels » ?
Il y a plusieurs facteurs. Les médias, qui ont demandé à chaque début de saison des créations, des nouveautés et des surprises. La recherche systématique de l’exotisme dans les produits. Plus c’est loin, meilleur c’est. La réinterprétation des classiques de plus en plus éloigné de l’original et dont le nom n’avait plus rien à voir. Exemple : la charlotte aux fruits rouges qui était simplement un biscuit aux amandes, un décor dessus, des fruits et en fait il ne restait que la mousse et les fruits alors que ce sont les boudoirs qui font la charlotte ! J’aime que les choses soient justes. J’ai fait de l’exotisme synonyme de lointain, et tout le monde l’a fait, aujourd’hui l’exotisme pour moi est dans la proximité, géographique et culturelle. Je ne revisite pas, je fais renaître.

Quelle est votre position et votre approche sur la « peur » du sucré ?
C’est beaucoup dans le discours et moins dans la réalité. Si on avait « désucré » comme on le dit depuis vingt ans, il n’y aurait plus de sucre ! J’adapte les classiques aux palais d’aujourd’hui et l’on met aussi moins de sucre car les techniques de conservation sont meilleures. Le sucre était un conservateur. Il faut sucrer mais faire des gâteaux moins gros, ainsi il n’y a pas de saturation de sucre.

façade hd S. Gaudard Michael Adelo© 340x181
Sébastien Gaudard
Pâtissier – Glacier – Chocolatier – Confiseur
22, rue des Martyrs
75009 Paris
Tél : 01 71 18 24 70
Mardi au vendredi : 10h – 20h
Samedi : 9h – 20h
Dimanche : 9h – 19h
[email protected]
www.sebastiengaudard.fr

Pâtisserie des martyrs7 Michael Adelo©
boutique


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