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Slow is beautifull

Par Oenotheque

Carl Honoré : Eloge de la lenteur.

Corby Kummer : Les plaisirs de Slow Food - Tradition du goût, goût de la tradition.

« La société malade du temps » titrait récemment un magazine. Interrogez votre entourage et vous constaterez le nombre important et croissant de personnes qui se sentent stressées, se disent agir dans une perpétuelle urgence, tout en manquant en permanence de temps pour tout : au travail comme pendant les loisirs, pour leur famille comme pour leurs amis, ... C’est un fait, nos rythmes s’accélèrent, et pas seulement dans l’univers professionnel. Le monde entier semble vouloir tout faire de plus en plus rapidement, dans une course désespérée à la vitesse. Aucun pan de nos activités ne semble pouvoir y échapper. Même des domaines que l’on pourrait prendre pour des bastions où le temps ne peut pas être brusqué ont aujourd’hui basculé dans le culte de Chronos. Le vin par exemple, avec cette tendance croissante de faire des vins aussi vite que possible, en accélérant si nécessaire les processus naturels. Pour quels résultats au final ? Des vins sans profondeur, vite vendus, vite bus, vite oubliés. N’oublions pas que Chronos avait mangé ses propres enfant. Son culte coute cher : stress, insatisfaction chronique, rapports humains superficiels, dépressions, malbouffe, pollution, ...

Slow is beautifull

Mais rien n’est perdu. Depuis quelques temps se développe la conscience de ses méfaits. Bien qu’il n e s’agit pas d’un mouvement structuré, la mouvance dite « Slow » touche de nombreux domaines de notre vie : le travail bien sûr, mais aussi l’alimentation (Slow Food), l’urbanisme (Citta Slow), les arts (Tempo Giusto), le sport, les loisirs (notamment ceux des enfants, dont nombre de parents surchargent aujourd’hui les agendas), la sexualité, …Dans un instructif travail de synthèse, Carl Honoré, journaliste britannique que rien ne prédestinait à devenir laudateur de Slow (bien au contraire), fait le tour des différentes facettes de cette mouvance. Ni énième philosophie alternative dont la mode passera à son tour, ni romantisme naïvement passéiste, la mouvance Slow nous amène avant tout à questionner nos modes de vie. Repérer ainsi les vrais enjeux de la vitesse permet de profiter de ses indéniables et nombreux bienfaits sans avoir à en payer le prix fort.

Slow is beautifull

Slow Food est certainement le mouvement le plus connu du grand public. Il s’oppose en tout point au Fast : produits si possibles locaux et de saison, recettes savoureuses, repas pris sans hâte (alors qu’au fast-food, la durée moyenne d’un repas est de 11 minutes). Au-delà des apports en termes de plaisirs et de santé, il s’agit ni plus ni moins de se réapproprier son alimentation, de lui redonner sens. J’ai lu quelque part d’un être humain occidental ingurgitait dans sa vie l’équivalent du chargement d’un semi-remorque de 15 tonnes. Ingurgiter en vitesse15 tonnes de bouffe industrielle grasse et sucrée, ou manger 15 tonnes d’aliments sains en prenant le temps de les savourer, voilà ni plus ni moins l’alternative à laquelle propose de réfléchir Slow Food.

Slow is beautifull

Les livres qui lui sont consacrés sont nombreux. Celui-ci a le mérite d’être beau (grâce aux photos de Susie Cushner) et complet. Outre une préface de Carlo Petrini, fondateur du mouvement, il présente des producteurs qui se démarquent dans leur domaine et des recettes de grands chefs qui ont adhéré à la démarche. Maraichers ou éleveurs, producteurs de fromage ou de sel, européens ou américains, leur point commun est une recherche sans concession de la qualité, dans le respect de l’environnement et de leurs clients. Côté viticulture, on croise Karl Kaiser, pionnier du vin de glace au Canada et Franck Dubosc, qui a donné ses lettres de noblesse à l’appellation côtes de saint-mont. Et si vous voulez mettre la main à la pâte, vous trouverez de nombreuses recettes, pas forcément très longues à préparer, car Slow Food est avant tout synonyme de plaisir et de qualité, et non d’aliénation de la ménagère … La première que j’ai testée était le barboton d’agneau, recette dauphinoise que Daniel Boulud sert dans son restaurant new-yorkais, une recette facile qui a toujours énormément de succès.

Eloge de la lenteur. Carl Honoré. 286 pages. Editions Marabout. 2005. 5,90 €.

Les plaisirs de Slow Food - Tradition du goût, goût de la tradition. Corby Kummer. 176 pages. Editions Seuil Chronicle. 2002. 39 €.

A ceux qui voudront explorer plus avant la problématique, je conseillerais Le culte de l’urgence de Nicole Aubert (376 pages, Flammarion, 2003, 19 €) qui y décortique avec acuité les différents mécanismes sociologiques, économiques, technologiques et psychologique qui ont rendu notre société «malade du temps ».


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