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Bretz'elles du désir

Par Nathalie Ruas
Bretz'elles du désirDans la ville de Sylvia, film de José  Luis Guérin sorti le 10 septembre nous entraîne dans une déambulation tellement poussée dans la capitale alsacienne qu'on sentirait presqu'une odeur de bretzel chaud...Pour prolonger cette impression, j'ai trouvé ici la recette des bretzels.
http://sandrakavital.blogspot.com/2006/01/bretzels.html
Je vous laisse suivre ses excellentes explications.
J'ai juste rajouté mon grain de sel en en fourrant quelques-uns au munster (à être dans le cliché, j'assume jusqu'au bout).  Je cherchais à obtenir le même effet que la pâte  Cheezy crust d'une célèbre marque de pizza.
Si vous voulez tenter cette variation fromagère, avant de former les boudins, il faut commencer par faire de grosses bandes sur lesquelles vous mettez de très fines tranches de munster en appuyant bien pour que le fromage se mêle intimement à la pâte. Puis vous transformez ces bandelettes en boudins et retour à la méthode de Sandra.
La bouche pleine de ces délices, voici mon impression sur le film
Un jeune homme, véritable incarnation du poète romantique du XIXe siècle, cherche dans les passantes (au sens baudelairien du terme) une résurgence de Sylvie . Des années auparavant, celle-ci lui avait dessiné au bar Les aviateurs un plan de Strasbourg sur une serviette en papier. Après une longue séquence attablé au café du TNS où le bel artiste croque, tantôt nonchalamment tantôt avec une soudaine urgence, des nuques, des visages, des confidences en quête de son éternel féminin. D'autres êtres s'interposent entre lui et son sujet passager, emplissent le champ, parasitent l'espace. A cette terrasse, la maladresse est de mise, les verres se renversent, les commandes n'arrivent pas à la bonne table, les conversations se décousent. Un vendeur à la sauvette insiste.
Soudain dans un reflet, une brune apparait, insaissisable et notre héros de lui emboiter le pas. S'engage une course poursuite vertigineuse, tant les champs et contre-champs s'enchaînent, tant les piétons les cyclistes tous les figurants de la vie quotidienne à Strasbourg défilent. Dans ce labyrinthe arrive fatalement l'instant où il est perdu. Des employés nettoient au karcher les grafittis qui auraient pu le guider. Sur une place, il se fige. Une sonnerie de portable, une robe qui flotte, quelques fleurs au balcon est-ce là l'antre secret de la belle ? A moins qu'un étage au-dessus ce ne soit elle qui en soutien-george sèche ses cheveux. Mais forcément elle n'est pas là où il l'attend et une fois qu'il l'a retrouvée forcément elle n'est même pas celle qu'il attend. Son désaveu dans une posture figée due au contexte (ils sont dans le tramway) mi amusé, mi pincé (elle n'a pas apprécié la filature) reçoit comme écho un répété "Quel désastre" et plusieurs salves de "Je suis désolé". Elle finit par descendre. Lui est rendu à sa quête, il cherche encore et toujours ces "elles" qui le feraient décoller. Les chevelures flottent au vent, les adolescentes s'ébattent, flirtent. Les mêmes rues sous un nouvel angle, avec d'autres passants, l'image oscille entre une tentative d'épuisement d'une rue strasbourgeoise et d'un jeu des 7 erreurs (les bouteilles vides sont toujours là, l'ivrogne a disparu) voire d'un "Où est Charlie". Les belles essuient des verres au fin d'un café, boudent, se dérobent. Lui feuillette son carnet, croquis et écrits mélangés et ce geste transforme l'objet en flip-flap, comme un reflet en dessin animé de toutes ces silhouettes inscrites à tout jamais sur le papier. Les Strabourgeoises attendent le tram à côté de beautés sur papier glacé. Glacé comme les enfants qui disent "tu gèles" quand leur compagnon de jeu s'éloigne du lieu où a été caché l'objet du délit. Et si dans cet infini quasi surréaliste sur les pas perdus de Breton, le héros s'éloignait toujours plus de son obscur objet du désir ?
Un film envoûtant, inventif tant dans la bande-son que sur les images pour ceux qui acceptent de voir à travers les yeux du réalisateur et de son sublime double interprété par Xavier Laffite. Un rien maniéré mais célébrant si joliment la ville et ses passantes,  ponctué de tant de trouvailles qu'on le suit partout...pour un peu les yeux fermés.

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