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Les patates aux 2756 épices

Par Estebe


Hey, ça gaze, les potes?

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Les placards des gourmets et des gourmettes ressemblent à des Musées d’histoire naturelle du XIXe siècle. S’y empilent, sans ordre apparent, les bocaux, boîtes et fioles. Les curiosités oubliées. Les trésors dans le formol (ou dans l’huile, plutôt). Les délicatesses désuètes.
Et les épices; des milliers d’épices. Des épices ramenées d’un voyage au Caire ou d’une virée en Sicile; des épices achetées pour une recette que jamais plus on ne refera; des épices offertes benoîtement par Mamie Lucienne ou Renée la voisine; des épices dont on ne sait plus rien, ni le goût, ni le pedigree.

Elles titillent notre mauvaise conscience, ces épices en sédiments. Elles attendent, s’éventent, vieillissent dans la pénombre. On devrait les balancer. On ne peut s’y résoudre.
Mine de rien, c’est un drame qui se joue au fond des placards des gourmets et des gourmettes.
Alors, une fois de temps en temps, comme on sort l’aïeule de la maison de retraite pour une balade au bord de la mer, extirpons ces poudres et graines de leurs ténèbres pour qu’elles retrouvent, ne serait-ce qu’un instant, leur raison d’être (c’est beau ça, on dirait du Roger Martin Du Gard).

Voilà donc des patates au four toutes couillonnes mais résolument fun, parfumées aux 2756 épices.

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Avisez de chouettes patates, de taille moyenne, pas des naines, pas des monstres non plus. Nettoyez-les. Ouvrez-les en deux dans le sens de la longueur. Et de la pointe du couteau, incisez leur chair en quadrillage. Puis, entre le pouce et l’index, écarquillez la patate, de manière à l’oindre d’huile d’olive en profondeur. Salez et puis…
sortez vos 2756 épices du placard! Yaou!

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Et accouplez-les, deux par deux, trois par trois, quatre à quatre. Osez les mariages chromatiques, les mariages régionaux, les mariages contre nature. Le sumac et le paprika. Le ras el hanout et le basilic séché. La cardamome et le romarin. Le garam massala et le poivre japonais. La graine de fenouil avec ce machin mystérieux qui sent la rose et les pieds. Ce machin mystérieux qui sent la rose et les pieds avec le curry pakistanais.
Hi, hi, hi. C’est l’orgie à tous les étages de la Tour de Babel. La partouze à l’ONU. Le bal masqué à Babylone. Le 14 juillet à Vierzon. La grande réconciliation cosmique, quoi.

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Hum… remettez un peu d’ordre dans vos vêtements. Et enfournez à 160°, une heure environ, jusqu’à ce que le couteau transperce les patates en riant.

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Gustativement, certes, l’affaire s’avère un rien confuse, quoique distrayante.
Car toute la famille peut jouer à deviner le nom des aromates. Ça met une sacrée ambiance à table. On se croirait presque dans une pub pour la crème brûlée Grand-Mère.

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Bisoux 


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