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Haro sur Adjani

Par Vierasouto

Un an auparavant, Adjani avait accepté une production de photos superbes pour une expo, photos inspirée du "Maître et Marguerite", une commande d'un milliardaire russe réalisée en Russie avec un budget et une équipe digne d'un plateau de tournage de film. Et puis, Lancel, les photos des pubs Lancel (elle a même créé son propre sac à main) sont affichées partout, sur le site de la marque, on a bien tenté le making-off de la séance photo au Crillon par Bettina Rheims, mais seuls quelques rares clichés d'Adjani le visage barré ou de profil ont été publiés, on ne la voit quasiment pas. Un peu mieux tout de même que pendant le reportage d'une équipe qu'elle accepta de recevoir pendant les répétitions de "Marie Stuart" au théâtre Marigny, exigeant de n'être filmée que de dos... "Marie Stuart" est le rôle le plus sincère et pathétique d'Adjani, cette reine déchue qui raconte avant d'être exécutée qu'elle était la plus belle autrefois, qu'elle a tout perdu, sa beauté, sa jeunesse, son pouvoir... Un peu comme Simone Signoret qui s'était laissé aller, voir auto-détruite, devançant l'appel de la dégradation physique, ne supportant pas (en deux mots) de passer de "Casque d'or" à "La Vie devant soi", il semble qu'Adjani ait fait lundi  dernier au Lido une apparition très Signoret : puisqu'il est impossible d'avoir toujours vingt ans et la beauté éternelle, autant dynamiter le personnage, l'image, grossir exagérément, s'enlaidir à dessein, se faire remarquer par l'excès inverse... Une sorte de suicide narcissique... Or, contrairement à une Martine Carol, qui, outre sa performance dans "Lola Montes" (justement dans un rôle de reine déchue), ne possédait vraiment que sa plastique pour tenir le haut de l'affiche, voire une Bardot, mauvaise actrice et détestant ce métier, qui a su se reconvertir ensuite dans l'animalitaire, Adjani est une authentique comédienne avec un talent exceptionnel qui n'est pas lié, contrairement au piège de l'image parfaite où elle s'est emmurée, à l'absence totale de rides sur un visage (elle en avait certainement davantage à 20 ans) ou à la transparence permanente d'un regard bleu marine immortalisé par la légende.
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Comme disait Gainsbourg qui en savait quelque chose, la vieillesse, c'est la revanche des laids, la beauté est un cadeau empoisonné, non seulement, être l'objet du désir universel, comme le sont les stars, n'est pas de tout repos, voire insupportable à vivre même si l'on en a fait son fonds de commerce (c'est toute l'ambiguité Marilyn Monroe), mais la perte de l'image idéale  dans le regard des autres, amplifiée par l'exposition de son duplicata partout (les photos, le contrôle de l'image) est vécue comme une mutilation. Fasse qu'Adjani comprenne que son public, celui qui paye sa place au cinéma ou au théâtre, l'aime pour ses rôles, qu'elle est  intemporelle  grâce ses films et qu'aujourd'hui on attend d'elle des performances d'actrice dont elle seule est capable. Au lieu de se gaspiller à poser pour "Elle" et autres magazines dits féminins pour tenter de se rassurer en obtenant naturellement l'effet inverse (des publications où tout cliché est photoshopé, des journalistes flatteurs enfermant les stars dans des commentaires courtisans "elle fait si jeune... au moins dix ans de moins..."), elle pourrait, par exemple, s'occuper de faire publier un coffret DVD de l'intégrale de ses films. La réaction des médias après son passage au Lido a été ce qu'on pouvait en attendre : feignant hypocritement de s'ébahir de son maquillage, ils l'ont descendue en règlant de vieux comptes... Des kilos en trop? C'est réversible.. Le maquillage, éphémère... Là où  Adjani risque de surprendre et laisser aphone le choeur toxique médiatique, c'est avec "La Journée de la jupe"*** dont on peut voir le trailer...
*** Film réalisé par Jean-Paul Lilienfeld, diffusé le 20 (ou 24) mars 2009 sur ARTE France puis distribué au cinéma dès le 25 mars 2009 par Rezo Films. Avec Isabelle Adjani, Denis Podalydès, Jackie Berroyer.


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