Magazine Beaux Arts

"Les funérailles de Mona Lisa"

Publié le 12 juin 2009 par Myriam

Autant les portraits d'Andy Warhol sont colorés, représentatifs d'une image glamour, idéale, autant ceux de Yan Pei-Ming sont ancrés dans le réel, et la plupart du temps sombres. Il s'y lit l'angoisse, la crispation de l'humanité et sa Mona Lisa qui vient d'être exposée au Louvre (au même endroit où l'on a pu admirer les femmes d'Alger de Delacroix/Picasso) n'y échappe pas ! 

Léonard de Vinci - La Joconde
Ce n'est pas la première fois que le tableau le plus connu au monde "La Joconde", peint par Léonard de Vinci, fait l'objet d'une appropriation par un artiste. Appropriation provocatrice par Marcel Duchamp en 1919 avec L.H.O.O.Q. qui l'affuble d'une moustache et d'une barbichette, ou par Salvador Dali en 1954 qui en profite pour faire son "Autoportrait en Mona Lisa", revisitation relativement conventionnelle par Fernand Léger en 1930 avec "La Joconde aux clés", ou par Fernando Botero avec la"Mona Lisa", ou carrément relecture de l'œuvre par Robert Filliou en 1968 avec "La Joconde est dans l'escalier", toutes ces relectures sont, somme toute, une fois que l'on a dépassé le stade de la dérision et de la provocation assez rafraichissantes !

Plus récemment avec des artistes comme Andy Warhol, Jean-Michel Basquiat ou Rauschenberg, l'image renvoyée de cette icône, au delà de la provocation, est bien plus inquiétante, sombre, pessimiste, comme un reflet de notre société actuelle (?) et Yan Pei-Ming se situe dans le même registre, avec son polyptyque monochrome constitué de cinq tableaux.

La Joconde, placée au centre de ce "retable", est encadrée de part et d'autre par un paysage imaginaire assez indistinct où l'on peut voir répétés des crânes humains (réalisés à partir d'un scanner du crâne de l'artiste) gisant sur le sol.

Yan Pei-Ming - Les funérailles de Mona Lisa

Pour la première fois, le paysage à l'arrière plan présente une certaine unité qui aurait fait plaisir à l'historien d'art Daniel Arasse ! (1) Deux autres portraits complètent ce triptyque, à gauche le père de l'artiste mort, les yeux ouverts, et à droite un autoportrait de l'artiste qui préfigure en quelque sorte sa mort. On est happé à la fois par la grisaille de cette œuvre et à la fois par l'impression de blancheur ... "En Chine, le blanc est la couleur du deuil, mais pour que ce blanc existe, je l'ai interprété en gris" (2). Et la mort est présente partout à l'exception de la Joconde qui apparaît belle et bien vivante malgré des larmes de peinture sur son visage et ses mains croisées ... C'est là le paradoxe de ces funérailles fantomatiques de l'icône de la peinture occidentale par Yan Pei-Ming, artiste qui de son vivant est exposé au Louvre, et qui lui se représente déjà "mort, mourant ou endormi" (2).

(1) Daniel Arasse, "Histoires de peintures", chapitre 2

(2) Propos de Yan Pei-Ming recueillis par Guillaume Durand

(3) Pour ceux qui souhaitent aller plus loin, interview de l'artiste sur FR3 en février 2009


Retour à La Une de Logo Paperblog

LES COMMENTAIRES (1)

Par vous me manqué les fille (ève et élodie).
posté le 16 avril à 22:35
Signaler un abus

j'adore la mona Lisa