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Ubu Roi

Par Lebibliomane
Ubu Roi
"Deuxième chronique du règne de Nicolas 1er" Patrick Rambaud. Roman. Grasset, 2008
Adresse à Notre Très Émoustillant Souverain,

Trésor National Vivant




C' EST PARCE QUE NOUS SOMMES NOMBREUX à souffrir votre règne, Sire, que j'ai entrepris de le raconter depuis son aurore, afin qu'en demeurent les péripéties et, oserais-je le dire, une manière de trace.


Dans un premier volume de cette chronique, j'ai évoqué Votre Grandiose Installation sur le trône encore chaud du roi Chirac et les six mois bouillonnants qui suivirent. J'y brossai comme à la paille de fer, les figures les plus clinquantes qui formaient votre Cour et relatai la bousculade calculée des événements qui plongèrent le pays dans la stupeur, puis dans le stupide. Je redoute, Sire, de vous parler aussi ouvertement, mais ce Livre II va chanter une nouvelle chanson, puisqu'il s'ouvre sur les fissures qu'on aperçut bien vite craqueler la façade de votre bel édifice, et sur le réveil du populaire engourdi par vos tours et vos atours. La plume m'en tremble entre les doigts, mais Votre Compulsive Grandeur doit comprendre que, selon les lois de la nature et celles de la politique, la pluie succède au beau temps. Voici venue pour Votre Omnipotence la saison des orages.
   P.R.
Ainsi commence le tant attendu deuxième volet des Chroniques du règne de Nicolas 1er dont le premier volume avait failli me faire étouffer de rire sur une situation qui, pourtant, ne prête pas à la rigolade : l'accession au pouvoir du plus sinistre bouffon que notre république ait jamais connue.
Patrick Rambaud y relatait avec talent et ironie les six premiers mois du règne de ce petit autocrate qui, dès le départ, sût s'adjoindre les services d'une équipe gouvernementale à son image, ramassis d'obséquieux aigrefins et de traîtres cauteleux. On y vit, peints au vitriol, outre la figure de notre divin potentat, les portraits de celles et ceux qui eurent l'insigne honneur de paraître à la Cour : les traîtres Kouchner et Besson, la baronne d'Ati « qui gardait les Sceaux et les robes prêtées par M. Dior », la marquise de La Garde, ou encore le chevalier de Guaino et le cardinal de Guéant, éminences grises du pouvoir qui, tour à tour, tentent d'enseigner à notre monarque les subtilités de la politique internationale en se référant aux albums de Tintin et Milou.
Cette deuxième chronique s'ouvre sur la visite un tantinet tapageuse du calife bédouin Mouammar le Cruel qui vient planter sa tente dans les jardins du palais. Suit l'entrée en scène de la comtesse Bruni, introduite auprès de notre auguste monarque par l'entremetteur Séguéla « ...Un transfuge qui choyait jadis le roi Mitterrand ; ce publiciste verbeux, décati, bronzé pour l'éternité à la lampe, organisait des soupers et de menus plaisirs aux puissants qui entretenaient son aisance. »
« Comme la soirée finissait, la comtesse dit à Sa Majesté d'une voix caressante :

-T'as une bagnole ?

-Une douzaine, j'en ai une douzaine au bord du trottoir.

-Tu me ramènes ?

Notre Prince Eblouissant, cette nuit-là, ramena la comtesse à la porte de son hôtel particulier discret, sans laquais ni flambeaux mais en cortège, et ils avaient assurément beaucoup parlé puisque le lendemain matin, appelant l'entremetteur pour le remercier, Sa Majesté eut d'entrée cette phrase d'un romantisme fougueux qui affirmait le coup de foudre :

-Dis donc ! Elle est pétée de thunes ! »
On y assistera aussi à la visite au Vatican en compagnie du pitoyable « humoriste » M. Le Grossier du Bigard, l'affaire du SMS « Si tu reviens, j'annule tout », celle du « Casse-toi, pauv'con! », le tout-à-l'égout du Cap-Nègre, la présidence tournante de l'Europe ainsi que les embarrassantes affaires de Géorgie et des honteux Jeux Olympiques de Pékin où notre Leader vénéré joua les matamores devant les médias au sujet du Tibet et des Droits de l'Homme avant de courber obséquieusement l'échine devant la puissance de l'Empire du Milieu.
On verra aussi se profiler la silhouette du Prince Jean, brièvement évoquée lors du précédent volume à propos d'une histoire de vol de scooter brillamment résolue à l'aide des empreintes génétiques relevées sur le deux-roues. On assistera ici à son abandon d'une « prometteuse » carrière théâtrale au profit d'une autre, beaucoup plus rémunératrice, celle de la politique. Prouvant ainsi, par ses premiers pas dans cette matière, que les gênes de la traîtrise sont transmissibles de père en fils, le jeune et sémillant Prince Jean portera un coup mortel à M. de Martinon qui briguait la municipalité de Neuilly et finira exilé en Californie « dans une maison bleue, adossée à la colline. »
Gageons que l'on entendra encore parler du Prince Jean dans le prochain opus de ces « Chroniques du règne de Nicolas 1er » puisque, c'est promis, Patrick Rambaud nous annonce, à la fin de ce deuxième ouvrage, qu'il sera suivi d'un troisième où il ne manquera pas – j'en suis certain – d'évoquer l'étourdissante affaire de la possible nomination du blondinet à la présidence de l'EPAD, affaire qui fit, et fait encore se gondoler le monde entier.
Il nous parlera sûrement aussi de hilarante tentative de notre monarque qui, aux yeux du monde et photo à l'appui, a voulu nous convaincre il y a quelques jours encore qu'il avait à lui tout seul et armé d'une modeste pioche fait tomber le Mur de Berlin.
Patrick Rambaud, qui est membre de l'académie Goncourt, ne manquera pas non plus d'évoquer la polémique suscitée par la talentueuse Marie N'Diaye, lauréate 2009 du prix susnommé et qui, après s'être expatriée à Berlin suite à l'élection du Leader Minimo, a déclaré récemment qu'elle trouvait « monstrueuse » la France de sarkozy, et qu'elle « trouve détestable cette atmosphère de flicage, de vulgarité ».
On s'attendait, suite à ces propos, que l'Élysée lâche son pittbull en la personne de Frédéric Lefèbvre, mais ce fut finalement Eric Raoult, un teckel bedonnant, maire du Raincy et député de la 12e circonscription de Seine-Saint-Denis, qui, avec les vastes connaissances littéraires qu'on lui connaît, a pris à partie la lauréate du Goncourt, déclarant que « le message délivré par les lauréats se doit de respecter la cohésion nationale et l'image de notre pays », valeurs que, pourtant, notre président et son gouvernement, s'appliquent quotidiennement à fouler aux pieds depuis ce triste jour de mai 2007 où la France est tombée dans l'abjection et le ridicule.
Assurément, au vu de tout cela, M. Rambaud ne manquera pas d'éléments pour son troisième et prochain opus que j'attends avec impatience.


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