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Sean Penn sublime le parcours de Christopher Mc Candless

Par Christophe Greuet

Sept ans après The Pledge, brillant polar interprété par un Jack Nicholson transi, Sean Penn reprend la caméra pour son projet le plus ambitieux : adapter l’histoire de Christopher Mc Candless. Ce jeune homme refusa toutes les facilités de la société américaine, pour s’immerger dans les profondeurs de la Nature.


Tournant le dos à une existence confortable mais malheureuse à ses yeux, Christopher Mc Candless quitta sa Virginie natale au début des années 90 pour parcourir les Etats-Unis. Des champs de blé du Dakota aux méandres du Colorado, son voyage se termina deux ans plus tard en Alaska, terre d’asile pour les esprits de la Nature. Un journaliste a tenté de comprendre ce destin à la fin tragique : Jon Krakauer. Son enquête, Voyage au bout de la solitude (Into the wild, réédité en France aux Presses de la cité) fut l’un des livres les plus vendus de l’année 1996 aux Etats-Unis, transformant Christopher Mc Candless en Lord Byron de notre temps.
Un poème du lord anglais débute d’ailleurs ce voyage cinématographique. Sean Penn nous emmène au-delà des zones pavillonnaires qui dégoûtent tant Christopher Mc Candless. Les forêts des Rocheuses ou l’étendue désertique de l’Arizona remplissent l’écran et nous immergent dans la beauté sauvage. Et pour un meilleur rendu, la production s’est offert l’excellent et primé directeur de la photographie français Eric Gautier (Carnets de Voyage, les films de Resnais ou d’Assayas...). Entre ces plans de contemplation, la caméra suit de près les tribulations d’un héros de l’anti-conformisme américain.
Pour incarner l’âme perdue de Christopher Mc Candless, Sean Penn a parié sur Emile Hirsch. Un choix risqué au vu de la filmographie du jeune premier. On l’a récemment vu dans Girl next door (un teen movie passable), Alpha dog (dans lequel Justin Timberlake l’éclipse largement)... C’est sa prestation dans les Seigneurs de Dogtown qui lui a permis de faire ses preuves (et de décrocher la tête d’affiche du dernier film des frères Wachowski, Spedd racer (voir notre article). On ne peut que remercier Sean Penn de lui avoir offert ce nouveau rôle ! Car Emile Hirsch a mis toute son âme dans Into the Wild. Transformé physiquement (le comédien n’a pas hésité à perdre vingt kilos), il capte toute l’attention du spectateur jusqu’à son dernier souffle. Le public pourrait presque croire qu’Into the wild est un documentaire et qu’Emile Hirsch est vraiment Christopher Mc Candless. Un jeu d’acteur sensationnel qui rappelle le Ryan Gosling d’Half Nelson.
Si Emile Hirsch fait partie des jeunes favoris pour les oscars, les seconds couteaux n’ont rien à lui envier. Tout au long de son périple quasi-shamanique, Christopher Mc Candless a rencontré des personnages attachants qui l’ont nourri de leurs réflexions sur la vie, sur leurs rapports à la Nature. Certains seconds rôles valent le voyage, comme Vince Vaugh en ouvrier agricole fugitif ou Catherine Keener en hippie désabusée. La prestation d’Hal Holbrook, vieille figure du Nouvel Hollywood qui rode encore dans quelques séries télévisées, est particulièrement saisissante : il incarne un homme qui a trop vécu et qui retrouve goût à la vie au contact du jeune Mc Candless.
Sean Penn réalisateur a su pousser tous ses comédiens à leurs limites, pour en faire sortir le meilleur. Si la réalisation est parfois trop contemplative (quelques longueurs sont à déplorer), Sean Penn confirme ses talents de direction d’acteurs. En compétition pour les prix de la Guilde des acteurs (tout comme Hal Holbrook et Catherine Keener), Emile Hirsch devrait gagner ses galons d’espoir confirmé.

Gaël Vaillant

Un film de Sean Penn avec Emile Hirsch, Vince Vaughn, Catherine Keener. Sortie française le 9 janvier 2008.

Visionnez la bande-annonce du film :


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